Le 24 mai dans les locaux au Quai Ă PĂ©rigueux, s'est tenue une confĂ©rence dĂ©bat autour du thĂšme "Revenu universel utopie ou futur proche?" Erwan Dubarry-Baete, membre de la nouvelle Ă©quipe reconstituĂ©e depuis mars 2016, a prĂ©sentĂ© l'association créée en 1996 et soucieuse de faire de l'Ă©ducation populaire en organisant des dĂ©bats, des expositions et autres manifestations culturelles. Le sujet abordĂ© ce soir-lĂ concernait le revenu de base, une idĂ©e de plus en plus mĂ©diatisĂ©e en France. La question est importante Ă l'heure oĂč de nombreux mouvements sociaux agitent la France oĂč, par ailleurs, la rĂ©volution numĂ©rique est en cours. En effet, le temps libĂ©rĂ© par les ordinateurs et les robots diminue le besoin de main d'oeuvre et rend l'humain plus disponible. Cette Ă©volution pose des questions sur le partage du temps de travail et des richesses. Face Ă cela, des rĂ©ponses existent comme le revenu de base prĂ©sentĂ© ce soir-lĂ par Arthur Mignon du Mouvement Français pour un Revenu de Base MFRB et le salaire Ă vie, thĂšme du film d'Usul, commentĂ© par Nadja Martinez, prĂ©sidente du Quai. de gauche Ă droite Nadja Martinez, Erwan Dubarry Baete, Arthur Mignon Arthur Mignon a soulignĂ© le caractĂšre exceptionnel d'un dĂ©bat de ce type oĂč les deux rĂ©ponses Ă©taient confrontĂ©es. Ayant rejoint le Mouvement en 2015, il a repris le groupe local de PĂ©rigueux. Pour introduire son propos, il a lu la prĂ©sentation d'une piĂšce jouĂ©e le 3 mai dernier, au Palace Ă PĂ©rigueux, Relaps, dont nous avons rencontrĂ© le metteur en scĂšne il y a quelques mois Evoquant la gĂ©nĂ©ration Y, elle met en scĂšne des personnages "nĂ©s dans les annĂ©es 80 et Ă©levĂ©s avec la garantie que leur vie serait meilleure que celle de leurs parents, ils n'ont pas d'accĂšs au travail, ou de façon prĂ©caire. Au fait, en veulent-ils vraiment un?". Membre de cette gĂ©nĂ©ration, Arthur Mignon a expĂ©rimentĂ© les affres de "l'assistance sociale" oĂč il s'agit avant tout de mettre les usagers sur le chemin de l'emploi, considĂ©rant qu'il est leur unique besoin, nĂ©gligeant des besoins aussi importants que la culture, par exemple. Se rĂ©fĂ©rant Ă Thomas More qui dĂ©crivait dĂ©jĂ au XVIĂš siĂšcle comment le pouvoir canalisait le peuple en lui Ă©vitant d'accĂ©der Ă l'argent et Ă la libertĂ©, il a montrĂ© que le revenu de base permettait de remettre en cause les rapports de domination en jeu oĂč le peuple Ă©tait contraint de vendre sa force de travail et oĂč les banques Ă©taient toutes-puissantes. Poursuivant ses rĂ©fĂ©rences historiques, il a citĂ© Thomas Paine, un rĂ©volutionnaire anglo-amĂ©ricain, Ă©lu dĂ©putĂ© Ă l'AssemblĂ©e Nationale en 1792 qui souhaitait contribuer Ă la dĂ©mocratie effective alors que c'est la dĂ©mocratie reprĂ©sentative de l'AbbĂ© SieyĂšs que l'Histoire a retenue. image extraite de Pour Thomas Paine, auteur de La justice agraire 1795, il n'y avait de dĂ©mocratie que si les citoyens Ă©taient Ă©conomiquement libres et disposaient donc de revenus. En cela, il Ă©tait proche des idĂ©es des physiocrates la richesse provenait de la terre et quand on en disposait pas, il Ă©tait nĂ©cessaire de bĂ©nĂ©ficier d'une indemnisation qui assurait sa subsistance et permettait de rĂ©tablir l'Ă©galitĂ© de moyens entre les possĂ©dants de la terre et les autres. Ces idĂ©es novatrices de la pĂ©riode rĂ©volutionnaire ont Ă©tĂ© reprises au XXĂš siĂšcle mais parfois dĂ©tournĂ©es. L'Ă©conomiste libĂ©ral, Milton Friedman, a proposĂ© un crĂ©dit d'impĂŽts tandis que Paine parlait d'une dotation versĂ©e Ă la majoritĂ©. L'idĂ©e de revenu de base a vraiment pris de l'ampleur dans les annĂ©es 1970-80. Au Canada, elle a Ă©tĂ© expĂ©rimentĂ©e dans une ville pendant plus de 10 ans. Dans les annĂ©es 1980, l'Ă©conomĂštre Yoland Bresson a lancĂ© avec Henri Guitton l'Association pour l'Instauration du Revenu d'Existence AIRE. C'est Marc de Basquiat qui a pris la prĂ©sidence Ă sa mort en 2014. En 2013, c'est Gaspard Koenig qui a fondĂ© le think-tank GĂ©nĂ©rationLibre et publiĂ© Liber, un revenu de libertĂ© pour tous Ce sont des auteurs libĂ©raux qui ont mauvaise presse chez les progressistes, a expliquĂ© Arthur Mignon, mais c'est la vision la plus connue du revenu de base. Au sein du MFRB, créé le 3 mars 2013, dans le contexte de l'initiative citoyenne europĂ©enne pour le revenu de base, il existe un large spectre de propositions. Ainsi, Baptiste Mylondo, Ă©cologiste, qui a beaucoup Ă©changĂ© avec Bernard Friot, dĂ©fenseur du salaire Ă vie, estime que si l'on se base sur le PIB, le revenu disponible par habitant serait de plus de 1000 euros par mois pour un partage strictement Ă©galitaire, soit plus du double de la proposition de GĂ©nĂ©rationLibre. Tandis que le premier estime que l'impĂŽt sur le revenu peut ĂȘtre financĂ© dĂšs le 1er euro gagnĂ©, le second souhaite la conservation d'un modĂšle progressif oĂč les plus pauvres ne seront pas taxĂ©s et prĂ©conise l'instauration d'une derniĂšre tranche d'impĂŽt sur le revenu Ă 100%. Selon Baptiste Mylondo, le revenu de base tel qu'il l'envisage remet en cause le chĂŽmage comme une institution artificielle qui maintient la population dans la peur du lendemain. Elle est compatible avec la capitalisme mais en Ă©branle tous les fondements. Quant Ă AndrĂ© Gorz, prĂ©sentĂ© par Arthur Mignon comme un philosophe Ă©co-socialiste, il Ă©tait favorable au partage du temps de travail une libre rĂ©partition du nombre d'heures affectĂ©es pour la vie active. Puis, il s'est rangĂ© du cĂŽtĂ© d'un revenu de base inconditionnel sans contrepartie en constatant que raisonner par nombre d'heures de travail n'avait plus de sens dans un contexte post-fordiste. Il Ă©tait une remise en cause des fondements du capitalisme mais pas de la monnaie dont les Etats n'avaient plus le monopole de crĂ©ation. Les banques commerciales la crĂ©aient grĂące au crĂ©dit constituĂ© de 3 parties l'emprunt lui-mĂȘme, les intĂ©rĂȘts, qui servent surtout Ă enrichir les banquiers mais aussi Ă produire des piĂšces et billets, et les assurances sur le crĂ©dit pour se prĂ©munir des dĂ©fauts de paiement et protĂ©ger les profits. Le systĂšme perdurait du fait de l'existence du crĂ©dit. Ces notions ont Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ©es par GĂ©rard Foucher dans Les secrets de la monnaie et qui a donnĂ© une confĂ©rence gesticulĂ©e Ă PĂ©rigueux en 2014. Il propose de remplacer la monnaie dette par une monnaie libre de dette la monnaie Ă dividende universel. Quant Ă StĂ©phane Laborde, il dĂ©veloppe la ThĂ©orie relative de la monnaie. Il pense qu'il ne faut pas confier le monopole de la crĂ©ation monĂ©taire aux banques mais aux individus sous forme d'un revenu de base. La monnaie serait créée avec ce revenu. Plus la masse monĂ©taire est importante, plus le montant du revenu de base versĂ© rĂ©guliĂšrement Ă chaque partie prenante du systĂšme est Ă©levĂ©. L'unitĂ© de compte est le revenu de base lui-mĂȘme. Quant Ă l'association Positive Money, elle lutte contre le programme d'assouplissement quantitatif Quantitative Easing lancĂ© par la Banque Centrale EuropĂ©enne et milite en faveur d'une politique alternative la BCE financerait des investissements publics ou distribuerait de l'argent Ă tous les citoyens sous forme d'un revenu de base. Pour Arthur Migon, alors que dans le systĂšme actuel, on dĂ©finit qui a droit Ă l'argent redistribuĂ©, avec les monnaies libres Ă dividende universel, tout le monde a droit Ă l'argent de façon inconditionnelle. Donner ce revenu aussi aux riches casserait le rapport de domination que l'argent entretient, un de ses rĂŽles fondamentaux au-delĂ de couvrir un besoin. Pour l'intervenant, instaurer un systĂšme de gratuitĂ© oĂč il n'existe plus de fraudeur ni de voleur est une maniĂšre d'abattre la sociĂ©tĂ© de classe. Nadja Martinez a ensuite commentĂ© le film. Le salaire Ă vie est l'une des options possibles pour changer le systĂšme. Il n'est pas question de le mettre en opposition avec le revenu de base, d'autant que tous deux ont les mĂȘmes ambitions se libĂ©rer du marchĂ© de l'emploi, dĂ©connecter la population de son aliĂ©nation Ă la surproduction marchande en tant que producteur et consommateur, permettre de faire des choses qui paraissent utiles, dĂ©cider de ce que l'on produit, comment et pourquoi. Selon elle, le salaire Ă vie va plus loin dans son rapport au capital et semble plus long Ă mettre en place que le revenu de base, parce que celui-ci pose simplement la question du partage des richesses. Le Quai s'est intĂ©ressĂ© Ă cette question car il renvoie Ă la situation des artistes qui bĂ©nĂ©ficient en France du rĂ©gime de l'intermittence. Celui-ci reconnaĂźt un temps de crĂ©ation qui doit ĂȘtre rĂ©munĂ©rĂ© sans que cela gĂ©nĂšre immĂ©diatement une production. En son absence, la crĂ©ation risque d'ĂȘtre l'apanage d'un groupe de rentiers loin de la contre-culture et peu enclin Ă soulever des questions qui traversent une sociĂ©tĂ© de classe. La prĂ©sidente du Quai a ensuite choisi de prĂ©ciser des termes abordĂ©s dans le film, comme celui de la valeur ajoutĂ©e qui est produite par les forces de travail et reprĂ©sente le chiffre d'affaire d'une entreprise, ses consommations intermĂ©diaires dĂ©duites. Le capital est rĂ©munĂ©rĂ© sous forme de dividendes et d'intĂ©rĂȘts d'emprunts qui reprĂ©sentent 700 milliards pour 2000 milliards produits, le reste Ă©tant redistribuĂ© en salaires et cotisations. En mettant fin Ă la propriĂ©tĂ© lucrative, on met fin Ă cette ponction et le travail est envisagĂ© comme une activitĂ© et non comme un emploi qui enlĂšve le statut de producteur quand on n'en a plus. Dans le salaire Ă vie, le travail englobe toutes les activitĂ©s humaines comme productrices de valeur d'usage. La cotisation est prĂ©fĂ©rable Ă l'impĂŽt car celui-ci est ponctionnĂ© sur les revenus une fois distribuĂ©s distribution secondaire tandis que le premier l'est par distribution primaire. L'impĂŽt implique de reconnaĂźtre la propriĂ©tĂ© privĂ©e lucrative. Les cotisations Ă©tant prĂ©levĂ©es sur la valeur ajoutĂ©e, elles ne sont pas une dĂ©pense, idĂ©e vĂ©hiculĂ©e par les mĂ©dias dominants, mais une redistribution, d'autant plus si l'on reconnaĂźt la valeur d'usage et la production non marchande dans la valeur Ă©conomique. La propriĂ©tĂ© lucrative ayant disparue, les travailleurs deviennent propriĂ©taires de leurs moyens de production. RĂ©seau salariat est une association d'Ă©ducation populaire visant l'institution d'un statut politique du producteur, donnant droit Ă un salaire Ă vie attachĂ© Ă la qualification personnelle qui donne donc un salaire diffĂ©rent. Suite Ă cette intervention, le dĂ©bat Ă©tait lancĂ© avec la salle. Une question a Ă©tĂ© posĂ©e sur la position des gouvernements concernant ces sujets. En Suisse, une votation a eu lieu le 5 juin pour inscrire ou non le revenu inconditionnel et universel dans la Constitution et instaurer ensuite une loi mais elle a rejetĂ© le projet. En France, le Premier ministre, aprĂšs avoir parlĂ© de revenu de base ciblĂ©, a Ă©voquĂ© un revenu universel. Le MFRB a quelques dĂ©fenseurs parmi les dĂ©putĂ©s de gauche comme de droite qui ont fait des propositions de loi ou amendements mais pour l'instant sans suite. On peut citer FrĂ©dĂ©ric Lefebvre des RĂ©publicains, Delphine Batho, Isabelle Attard, proche de JosĂ© BovĂ©. La stratĂ©gie du MFRB se situe aussi Ă l'Ă©chelle rĂ©gionale et locale. EELV a lancĂ© une Ă©tude de faisabilitĂ© pour automatiser le RSA sans que l'usager n'ait de dĂ©marches Ă faire. C'est un premier pas vers l'instauration de ce revenu. Logo du Mouvement Français pour le Revenu de Base Un bibliothĂ©caire fonctionnaire a tĂ©moignĂ© de sa situation ayant vu sa bibliothĂšque fermĂ©e, et privĂ© de tĂąche, il est devenu malade de ne pas travailler. Il constatait qu'il Ă©tait plus actif en arrĂȘt maladie qu'au travail. A l'inverse, une travailleuse sociale a dĂ©clarĂ© ĂȘtre "en suractivitĂ©" et s'est dit intĂ©ressĂ©e par ce revenu qui lui permettrait d'envisager son travail diffĂ©remment, notamment en l'orientant vers un accompagnement plus humain, moins axĂ© sur l'Ă©valuation des situations de personnes susceptibles de rentrer ou non dans des dispositifs. Une fois le revenu de base acquis, on en ferait que l'on voudrait car il serait neutre non assorti d'obligations. Une autre membre du public se prĂ©sentant comme "en marge du marchĂ© de l'emploi" a insistĂ© sur l'importance de ce revenu qui permettait de favoriser le dĂ©veloppement personnel, dont Ă©taient soucieux un nombre croissant d'individus, a constatĂ© Erwan Dubarry Baete. Le dĂ©bat a ensuite portĂ© sur le salaire Ă vie diffĂ©rent en fonction du grade, sachant que le 1er grade commencerait Ă 1500 euros. L'idĂ©e dĂ©veloppĂ©e par Bernard Friot lui aurait Ă©tĂ© inspirĂ©e par sa propre situation de fonctionnaire universitaire. Bernard Friot Nadja Martinez a expliquĂ© que l'Ă©volution de ces grades et les rĂ©munĂ©rations affĂ©rentes seraient dĂ©cidĂ©es dĂ©mocratiquement. Une personne a considĂ©rĂ© que le revenu de base laissait la possibilitĂ© de prendre un travail ou pas et permettait de renouer avec une certaine libertĂ© telle qu'elle existait dans les annĂ©es 70, Ă©voquĂ©e par une autre personne. Arthur Mignon est revenu sur les deux modes de financement du revenu de base les prĂ©lĂšvements obligatoires comme les impĂŽts et la rĂ©forme de la crĂ©ation monĂ©taire qui ne serait plus le privilĂšge des banques formant actuellement une sorte d'"Etat financier". La crĂ©ation de la monnaie se ferait en dividende universel. L'Association pour l'Ă©conomie distributive plaidait dans ce sens. Erwan Dubarry Baete, se voulant rassembleur sur les deux propositions du salaire Ă vie et du revenu de base en montrant qu'elles permettaient toutes les deux de pouvoir subvenir Ă ses besoins, s'est demandĂ©, malgrĂ© tout, si le revenu de base n'Ă©tait pas la roue de secours du capitalisme. En effet, pour le Medef, le revenu de base permettrait de diminuer le salaire minimum. Par ailleurs, croire que l'on retrouverait le plein-emploi Ă©tait une hĂ©rĂ©sie. Les questions de l'activitĂ© et de l'emploi ont Ă©tĂ© ensuite distinguĂ©es, la situation de chĂŽmage n'empĂȘchant pas d'ĂȘtre actif dans la sociĂ©tĂ©, par exemple. Une personne a ainsi dĂ©clarĂ© qu'elle n'avait "pas envie de travailler mais de contribuer". Plusieurs intervenants ont semblĂ© d'accord pour affirmer la nĂ©cessitĂ© de se libĂ©rer du capitalisme, de sortir de l'esclavage. Un homme s'est toutefois montrĂ© pessimiste en faisant allusion Ă la loi El Khomry qui risquait de dĂ©truire la sĂ©curitĂ© au travail et ne voyait pas comment le revenu de base pourrait advenir dans la sociĂ©tĂ© telle qu'elle fonctionnait. Puis, le dĂ©bat s'est rĂ©orientĂ© sur la question de la monnaie qui aurait pu faire l'objet d'une soirĂ©e entiĂšre de discussions. Elle Ă©tait Ă©minemment politique, supposait une refonte de la sociĂ©tĂ©. Pour Arthur Mignon, instaurer la gratuitĂ© de l'argent Ă©tait une maniĂšre de saper les bases culturelles de la sociĂ©tĂ© et de dĂ©truire le clivage entre les sans-emplois et ceux qui y avaient accĂšs. La remise en cause du capitalisme Ă©tait plus longue. Une jeune femme impliquĂ©e dans une association oĂč se cĂŽtoyaient salariĂ©s et bĂ©nĂ©voles a montrĂ© combien, au regard des missions de cette structure, ce qui importait Ă©tait la conviction de chacun, pas le statut. Le revenu de base permettrait d'ĂȘtre libĂ©rĂ© de ce rapport au salariat et de se concentrer sur le sens du travail lui-mĂȘme. Arthur Mignon a conclu la soirĂ©e par quelques citations Ă mĂ©diter et Nadja Martinez a rappelĂ© le souci du Quai d'oeuvrer Ă l'Ă©ducation populaire et d'accĂ©der gratuitement Ă la culture. Cette soirĂ©e-dĂ©bat en Ă©tait un exemple. Texte et photos sauf copyright contraire Laura Sansot
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Accueil Revues Espaces et sociĂ©tĂ©s NumĂ©ro 2017/4 n° 171 Zone lâespace dâune vie... Ăditorial Zone lâespace dâune vie en marge Suivre cet auteur JĂ©rĂŽme Beauchez, Suivre cet auteur Florence Bouillon, Suivre cet auteur Djemila Zeneidi Dans Espaces et sociĂ©tĂ©s 2017/4 n° 171, pages 7 Ă 18 Suivant ArticlePlanBibliographieAuteursCitĂ© parfile_downloadTĂ©lĂ©charger Article MĂȘme si on dort dans la rue, on nâest pas des loques. On est des chĂŽmeurs, des zonards, des mancheurs, mais on nâest pas des clochards. » Propos anonymes, recueillis dans la rue par Lionelle Reynes 1985, p. 38 1 Alors que le quotidien des jeunes de banlieue » ou des bandes ethniques » focalise depuis plusieurs dĂ©cennies lâattention des sociologues, lâautre visage des jeunesses relĂ©guĂ©es que prĂ©sentent les zonards » reste quant Ă lui quasi invisible du point de vue des sciences sociales europĂ©ennes. Rares sont en effet les Ă©tudes de ces nomades du vide » Chobeaux, 2004 que seraient ces jeunes de la rue, que lâon dit aussi en errance » Laberge et Roy, 1996 ; Pattegay, 2001 ; Parazelli, 2002. Population sans domicile aux allures bigarrĂ©es, souvent accompagnĂ©e de ses chiens, ils apparaissent surtout dans le rĂŽle du mancheur rĂ©clamant la piĂšce sur le pavĂ© des centres-ville ou au seuil des supermarchĂ©s. Ă la fois terme vernaculaire et concept proche de lâexpĂ©rience, le mot zonard est celui que la plupart choisissent pour se dĂ©signer Pimor, 2014. La zone Ă©voque alors un mode de vie supposant de tracer sa route dans les marges de la sociĂ©tĂ© de consommation Angeras, 2012, dâoĂč les appellations de traceurs ou de routards Ă©galement employĂ©es par certains. 2 LâĂ©tymologie du terme renvoie Ă la zone non aedificandi non constructible qui sâĂ©tendait au-delĂ des fortifications de Paris. AprĂšs la guerre de 1870, la destination exclusivement militaire de cet espace a Ă©tĂ© peu Ă peu abandonnĂ©e pour cĂ©der la place Ă lâinstallation de baraquements, de roulottes et de taudis qui ont regroupĂ© les travailleurs pauvres, les chiffonniers, les vagabonds, les mendiants et autres reprĂ©sentants des classes dangereuses » dont Louis Chevalier a rĂ©alisĂ© une cĂ©lĂšbre historiographie Chevalier, 2002. Aux marges de Paris, les zoniers » incarnent alors la figure du paria urbain qui inquiĂšte ou menace la sociĂ©tĂ© bourgeoise. PhotographiĂ©s par EugĂšne Atget [1] 1913 et filmĂ©s par Georges Lacombe 1928, ils apparaissent comme mis au ban dâune sociĂ©tĂ© industrielle qui les a frappĂ©s dâinfamie. 3 Les zonards dâaujourdâhui composent une nouvelle strate de lâarchĂ©ologie des marges urbaines. RĂ©cente, elle trouve ses racines syncrĂ©tiques loin des anciennes fortifications de Paris, dans lâentremĂȘlement des subcultures punk et traveller nĂ©es outre-Manche au cours des dĂ©cennies 1970 et 1980. Tandis que la zone dâhier correspondait Ă un territoire bien dĂ©limitĂ©, celle dâaujourdâhui se matĂ©rialise dans les dĂ©placements de groupes qui Ă©voluent principalement dans les intervalles des villes. Si les zonards contemporains ne sauraient par consĂ©quent ĂȘtre vus comme leurs descendants directs, ils partagent nĂ©anmoins avec les zoniers dâautrefois certaines propriĂ©tĂ©s de situation dans lâespace social. Les uns comme les autres restent en effet confinĂ©s Ă des espaces caractĂ©risĂ©s par la relĂ©gation, Ă des situations Ă©rigĂ©es en problĂšme social. Ainsi la prĂ©sence et la visibilitĂ© des zonards â particuliĂšrement remarquĂ©es depuis le tournant des annĂ©es 2000 Ă lâoccasion des festivals dĂ©diĂ©s Ă la musique ou aux arts de rue â sont-elles le plus souvent envisagĂ©es comme relevant dâune problĂ©matique dâencadrement dâune fraction de la jeunesse considĂ©rĂ©e comme dĂ©viante. Ils font lâobjet dâune culture du contrĂŽle » Garland, 2001 qui oscille entre mesures de bannissement prises par certaines mairies et tentatives de rĂ©gulation dâune prĂ©sence dont il sâagit de maĂźtriser les potentiels effets pathogĂšnes. Les questions du sans-abrisme et de lâinsĂ©curitĂ© ont dĂšs lors Ă©tĂ© posĂ©es, aux cĂŽtĂ©s des problĂšmes de santĂ© publique liĂ©s aux consommations dâalcool et de produits stupĂ©fiants Chobeaux, 2004, p. 41-42 ; Hurtubise et Vat Laaroussi, 2002 ; Van Hout, 2011. 4 Ainsi la vie et le quotidien des zonards apparaissent-ils essentiellement en nĂ©gatif de ce quâen disent les pouvoirs publics ou les instances de rĂ©gulation sanitaire et sociale Langlois, 2014. Un nĂ©gatif qui, Ă la maniĂšre dâune image photographique oĂč les contrastes apparaissent comme inversĂ©s, ne donne Ă voir quâun reflet dâune rĂ©alitĂ© dont ressortent les dĂ©fauts, comme les manques. Ce numĂ©ro dâEspaces et SociĂ©tĂ©s a pour objet de proposer une autre prise de vue. Celle-ci ouvre sur une double perspective la premiĂšre cible les modalitĂ©s dâintervention, ou de non-intervention, de la puissance publique vis-Ă âvis des habitants et des acteurs de la zone. Hier comme aujourdâhui, comment les institutions font-elles face Ă des populations qui, de maniĂšre subie ou choisie, se situent Ă la marge des centralitĂ©s urbaines comme des normes sociales communĂ©ment partagĂ©es ? Quels sont les marges de manĆuvre accordĂ©es, les modalitĂ©s de rĂ©pression, les terrains dâentente Ă©ventuels, et comment se traduisent-ils du point de vue de la gestion de ces indĂ©sirables » ? La seconde focale a pour objet de restituer de lâintĂ©rieur les systĂšmes de valeurs qui orientent les actions des zonards. Du point de vue de ses acteurs, que dĂ©signe au juste ce signifiant dont la plasticitĂ© renvoie aux idĂ©es dâun espace indissociablement physique et symbolique ? Autrement dit, quâil relĂšve de lâauto-attribution ou du stigmate, Ă quoi correspond exactement le label zonard dans les mondes de la marge et leurs territoires ? Quels en sont les codes et de quelles façons se transmettent-ils ? 5 Pour rĂ©pondre Ă cette double interrogation, ce dossier se dĂ©cline en trois thĂ©matiques. Les deux premiers articles traitent de la zone parisienne dans une perspective sociohistorique. Les trois articles suivants proposent une description dense » Geertz, 2003 des modes de vie zonards aujourdâhui, en France, en Allemagne et en Grande-Bretagne. Ces modes de vie valorisent une forme dâentre-soi tentĂ© par le dĂ©tachement vis-Ă âvis de la sociĂ©tĂ© instituĂ©e. Enfin, parce que la zone ne constitue jamais un espace totalement Ă part, lâensemble se clĂŽt par une analyse du recours aux dispositifs de lâinfra-assistance, incluant la maniĂšre dont ce recours sâinscrit dans la construction dâune identitĂ© zonarde revendiquĂ©e. 6 En finalitĂ©, lâobjet de ce dossier rĂ©side dans les diffĂ©rentes façons de produire ces formes mouvantes de marginalitĂ©, dont les frontiĂšres indĂ©cises fluctuent entre conceptions Ă©miques la perspective des zonards et visions Ă©tiques celles de la sociĂ©tĂ© instituĂ©e et des pouvoirs publics. PlutĂŽt que de rĂ©duire le flou dont la notion de zone est empreinte, nous avons donc considĂ©rĂ© son caractĂšre labile comme le principal levier dâune approche qui articule espace et histoire ou diachronie et synchronie des usages et des modes de gestion dâune territorialitĂ© marginale. Une sociohistoire de la zone, espace de relĂ©gation7 La premiĂšre partie de notre dossier dĂ©taille le passage de la figure du zonier Ă celle du zonard, et donc la progressive modification des territoires de la zone. Cette enquĂȘte est ouverte par Anne Granier, laquelle concentre ses efforts sur la pĂ©riode de lâentre-deux-guerres et la microhistoire dâun segment de la zone parisienne situĂ© Ă Boulogne-sur-Seine. Lâauteure sâest consacrĂ©e Ă retracer la gĂ©nĂ©alogie du peuplement comme des conflits qui ont animĂ© cet espace, marquĂ© par lâla intolĂ©rance des pouvoirs publics Ă lâĂ©gard de ses occupants. En effet, si les pouvoir publics tolĂ©raient lâexistence de la zone faute de mieux, par nĂ©cessitĂ© de loger les plus pauvres dâentre les ouvriers qui ne pouvaient sâacquitter des loyers de Paris intra-muros, ils nâavaient pourtant de cesse de vouloir Ă©liminer le problĂšme social quâils constituaient Ă leurs yeux. La tolĂ©rance cĂ©dait alors le pas Ă lâintolĂ©rance pour des zoniers constamment en porte-Ă -faux vis-Ă âvis de la loi. Or, les gens sans aveu » nâont pas tĂ©moignĂ© seuls subsistent les propos tenus par ceux â dĂ©cideurs politiques, reprĂ©sentants de la loi et, plus rarement, petits propriĂ©taires zoniers â qui Ă©taient en charge de lâadministration quotidienne de cette enclave partagĂ©e entre Paris et banlieue, de mĂȘme quâentre reconnaissance partielle et marginalitĂ©. Câest donc le quotidien de ce territoire ambivalent quâAnne Granier sâest efforcĂ©e dâexhumer des archives, territoire qui fait moins lâobjet dâune rĂ©pression que dâun abandon surveillĂ© oĂč, tout au long des annĂ©es 1920 et 1930, les pauvres sont restĂ©s dans la visĂ©e des pouvoirs publics qui les ont encadrĂ©s mollement, les abandonnant le plus souvent Ă leur sort, dans lâattente de trouver une hypothĂ©tique solution Ă leur indigence. 8 Ălargissant la focale historique portĂ©e sur la zone de Paris, James Cannon interroge pour sa part la dĂ©clinaison historique des labels de dangerositĂ© et dâinfamie que la zone a charriĂ©s tout au long du xxe siĂšcle. De la Belle Ăpoque aux annĂ©es 1970, en passant par lâentre-deux-guerres, lâauteur puise dans diverses sources, dont celles de la littĂ©rature et de la chanson populaire, pour montrer comment les gĂ©nĂ©rations successives de zoniers et de zonards ont incarnĂ© diffĂ©rentes versions des classes dangereuses » Ă©voluant aux marges de Paris. Tour Ă tour perçus comme des rĂ©volutionnaires en puissance, des agents de lâĂ©tranger et des hommes dĂ©pravĂ©s voire les trois Ă la fois, les zoniers ont constituĂ© une figure marginale et le plus souvent criminalisĂ©e ; cette criminalisation a suivi diverses inspirations, selon les analystes et leurs sensibilitĂ©s idĂ©ologiques ou religieuses. Câest ainsi que la zone et ses habitants apparaissent comme dâefficaces rĂ©vĂ©lateurs de la maniĂšre dont la sociĂ©tĂ© française a construit ses figures de lâaltĂ©ritĂ© tout au long du premier xxe siĂšcle. Mais quid des Trente Glorieuses au cours desquelles la zone est effacĂ©e par les travaux du pĂ©riphĂ©rique urbain, disparaissant ainsi en tant quâespace annulaire qui constituait une ceinture de misĂšre autour de Paris ? Avec lâĂ©mergence de la figure moderne du zonard au dĂ©tour de la dĂ©cennie 1970, James Cannon montre que la zone dĂ©mantelĂ©e en tant quâespace physique se reconstitue comme style de vie marginal ; un style de vie dont les habitudes et les usages de la ville entrent le plus souvent en contradiction avec les rĂšgles, voire les lois en vigueur dans la sociĂ©tĂ© instituĂ©e. La zone, territoire de rĂ©sistances ?9 Le texte de James Cannon, qui se termine par cette Ă©vocation des zonards de la dĂ©cennie 1970, fait ainsi la jonction avec la suite du dossier. En retraçant lâethnobiographie de Gavroche, JĂ©rĂŽme Beauchez engage en effet un dialogue avec un zonard des annĂ©es 1990 et 2000, dealer de drogues et voyou auto-proclamĂ©, sur le fond dâune anthropologie collaborative [2]. Tandis que le rĂ©cit de cette expĂ©rience de la zone Ă©nonce son code du deal et de la rue, le chercheur interroge les significations dâune telle conduite de vie dont il souligne moins la rĂ©sistance quâune certaine conformitĂ© avec les principes les plus communs du commerce lĂ©gal et de la sociĂ©tĂ© instituĂ©e. Gavroche dĂ©crit en effet les savoir-faire, comme le savoir-survivre » Zeneidi-Henry, 2002 et les rĂšgles qui prĂ©sident Ă son mĂ©tier de dealer ; un mĂ©tier dont lâexercice est articulĂ© aux espaces de la zone dans lesquels il fait figure de patron dâune petite entreprise criminelle centrĂ©e sur la maximisation du profit. Les moyens sont ceux des techniques de vente et de management oĂč la violence se justifie par les nĂ©cessitĂ©s dâun marchĂ© dont les Ă©changes â petits ou grands â alimentent un vĂ©ritable capitalisme de la rue. En pĂ©nĂ©trant de plain-pied cette zone partagĂ©e entre les commerces interlopes les plus cachĂ©s et les principes marchands les plus avouĂ©s, lâarticle offre une perspective incarnĂ©e sur une maniĂšre de vivre et de constituer un territoire dont la marginalitĂ© ne signifie aucunement lâopposition radicale ou lâabsence de contact avec la sociĂ©tĂ© instituĂ©e. 10 Une Ă©chelle et un mode de description similaires ont Ă©tĂ© privilĂ©giĂ©s par Marcelo Frediani, dont lâenquĂȘte ethnographique conduite pendant la premiĂšre moitiĂ© des annĂ©es 1990 aux cĂŽtĂ©s des New Travellers en Grande-Bretagne Frediani, 2009 permet dâĂ©clairer la gĂ©nĂ©alogie et le mode de vie de groupes qui ont fortement influencĂ© les gĂ©nĂ©rations actuelles de zonards français [3]. Lâauteur dresse un portrait de celles et ceux dont il a partagĂ© la vie quotidienne en camion, sur les routes et dans des campements aussi sauvages quâĂ©phĂ©mĂšres ; une vie que lâauteur dĂ©crit comme adossĂ©e Ă une culture alternative inspirĂ©e dâun syncrĂ©tisme dâinfluences marginales qui vont du mouvement hippie Ă lâanarcho-punk, en passant par les spiritualitĂ©s new age, la musique Ă©lectronique et les free parties [4]. Tout lâenjeu du texte de Marcelo Frediani consiste dĂšs lors Ă rassembler ces faisceaux dâinfluences et dâexpĂ©riences autour de la question du besoin radical » dâespace qui aurait conduit les Travellers Ă prendre la route. Que lâon ne sây trompe pas un tel besoin nâest pas aussi trivial quâun simple appel de la vie au grand air. Sâil est radical, câest justement parce quâil rĂ©pond, selon le chercheur, Ă une nĂ©cessitĂ© créée par les forces dâĂ©viction du capitalisme nĂ©olibĂ©ral qui poussent les plus fragiles vers les marges du salariat et de lâhabitat conventionnel. Il sâagit alors aussi bien dâĂ©chapper Ă la spirale de lâenfermement dans les logiques du dĂ©classement que de combler ses besoins vitaux â se nourrir, se loger, nouer des rapports sociaux â et de sâengager dans une forme de radicalisme infrapolitique, ou de contre-culture, capable de constituer une alternative Ă lâĂ©viction. Cette alternative sâexprime au travers des communautĂ©s de pratique » que forment les Travellers en sâinscrivant dans des rĂ©seaux dâentraide fondĂ©s sur un socle de valeurs communes. Elle constitue Ă©galement une forme de retournement des stigmates qui conduit les Ă©vincĂ©s Ă faire de leur Ă©viction un principe de libertĂ© ou, Ă tout le moins, de rĂ©invention dâun espace du quotidien qui semble reprendre ses droits aux marges de la sociĂ©tĂ© instituĂ©e [5]. 11 Nombre de parallĂšles peuvent ainsi ĂȘtre tracĂ©s avec la zone de Gavroche dĂ©crite par JĂ©rĂŽme Beauchez. Dans les deux cas, lâengagement marginal relĂšve moins dâune opposition que dâune alternative aux fonctionnements socio-Ă©conomiques marquĂ©s par les logiques dâexclusion du capitalisme nĂ©olibĂ©ral. Tandis que Gavroche sâest contentĂ© de les retourner Ă son avantage dans les territoires oĂč il sâest comportĂ© en patron de sa petite entreprise criminelle, les Travellers rencontrĂ©s par Marcelo Frediani ont pour leur part conçu une critique radicale de ces fonctionnements. Cela Ă©tant, pas plus que Gavroche, ils nâenvisagent de fonder un mouvement qui aurait pour objet de promouvoir un changement de sociĂ©tĂ©. De leur point de vue, il sâagirait plutĂŽt dâĂ©chapper Ă sa violence et de prendre le large, entre soi. 12 Un entre-soi que lâanthropologue et photographe Ralf Marsault a Ă©galement documentĂ© depuis sa longue expĂ©rience des Wagenburgen berlinoises. Celles-ci dĂ©signent les rassemblements de caravanes et de camions qui ont commencĂ© Ă sâĂ©tablir dans les friches et autres interstices de la ville peu aprĂšs la chute du Mur Ă la fin de lâannĂ©e 1989 Marsault, 2010. Ouverts illĂ©galement, ces espaces oĂč se sont installĂ©s Travellers, punks et zonards issus de toute lâEurope avec une majoritĂ© de Britanniques et de Français font lâobjet dâune certaine tolĂ©rance de la part des pouvoirs publics. De tels campements constituent un excursus europĂ©en Ă lâhistoire des Travellers retracĂ©e par Marcelo Frediani, de mĂȘme quâune sorte de pendant germanique et fin de siĂšcle le xxe plutĂŽt que le xixe de la zone parisienne. Ă lâinstar de cette derniĂšre, nombre de Wagenburgen se sont en effet Ă©tablies sur une ancienne zone militaire non aedificandi celle du no manâs land qui sĂ©parait lâEst et lâOuest de Berlin Marsault, 2010, p. 36. Il nâest pas jusquâĂ lâappellation de Wagenburg qui ne garde une connotation martiale, puisque le terme a dâabord dĂ©signĂ© une tactique de dĂ©fense consistant Ă Ă©riger un mur de chariots » Wagen signifiant le vĂ©hicule et Burg lâidĂ©e de place forte pour parer les attaques de lâennemi sur les champs de bataille. De loin en loin, cette idĂ©e semble perdurer aujourdâhui parmi les Wagenburger. La plupart conçoivent leur mode de vie Ă la façon dâune rĂ©sistance â certes plus passive quâagressive â impliquant une stratĂ©gie de repli qui les prĂ©serverait des obligations comme des injonctions Ă la normalisation. Ralf Marsault se concentre alors sur les constructions qui font la Wagenburg â ses venelles, ses placettes et ses maisons â, et procĂšdent dâun ensemble de matĂ©riaux de rĂ©cupĂ©ration que les Wagenburger dĂ©tournent afin de concevoir une maniĂšre originale dâinvestir leur territoire et de lâhabiter. Ce systĂšme dâobjets est conçu par lâauteur comme la projection au sol des reprĂ©sentations qui animent les habitants. Au-delĂ dâune simple figure du campement, cette hypothĂšse lui permet dâobserver la Wagenburg comme une tentative de situationnisme sauvage qui nâest pas sans Ă©voquer une version punk de la Nouvelle Babylone imaginĂ©e par Constant [6]. Tracer les cartes de significations » dâune subculture marginale13 Outre les convergences dĂ©jĂ relevĂ©es, les trois Ă©tudes prĂ©sentĂ©es au point prĂ©cĂ©dent partagent un mĂȘme intĂ©rĂȘt pour ces territoires qui sont le fait dâindividus et de groupes Ă©voluant dans ce que Patrick Brunetaux et Daniel Terrolle Ă©d., 2009 ont appelĂ© lâ arriĂšre-cour de la mondialisation ». Depuis lâenracinement subjectif dans la zone de Gavroche jusquâaux objets qui peuplent le territoire des Wagenburger en passant par le systĂšme de valeurs des Travellers, cette arriĂšre-cour a Ă©tĂ© investie par des enquĂȘtes qui, sans pour autant sacrifier Ă une forme de romantisme des marges, ont refusĂ© lâessentialisation misĂ©rabiliste conduisant Ă enfermer les pauvres dans leur pauvretĂ©, ou Ă condamner les dĂ©classĂ©s au dĂ©classement. Par la mise en Ă©vidence du tout un savoir-survivre â fĂ»t-il parfois violent comme dans le cas de Gavroche â, il sâest plutĂŽt agi de souligner lâagentivitĂ© alternative [7] dont font preuve celles et ceux qui sâefforcent de construire une Ă©chappatoire et dâinventer leurs territoires en marge de la sociĂ©tĂ© instituĂ©e. Pour autant, celle-ci ne disparaĂźt pas dâun quotidien fait dâĂ©vitements, mais aussi de frottements plus ou moins rĂąpeux avec des institutions et des lois censĂ©es encadrer celles et ceux qui affichent leur souhait dây Ă©chapper. 14 Ces frottements sont au cĆur de lâarticle signĂ© par CĂ©line RothĂ©, laquelle nous ramĂšne en France, pour conclure ce dossier par une rĂ©flexion sur la façon dont les zonards perçoivent et utilisent les dispositifs dâassistance qui leur sont destinĂ©s, en particulier celui dâun accueil de jour dit Ă bas seuil dâexigence. Ce lieu est pris dans une nĂ©gociation permanente entre logiques zonardes et relatif effacement des travailleurs sociaux, qui maintiennent toutefois la prĂ©sence discrĂšte dâun cadre assorti de ses rĂšgles. Rien du style de vie des zonards nâest forclos de ce lieu les chiens y ont droit de citĂ© mais en nombre limitĂ©, tout comme les substitutifs aux opiacĂ©s dont la consommation addictive â comme celle dâautres substances â concerne un nombre consĂ©quent de celles et ceux qui disent avoir choisi la rue. LâidĂ©e dâun tel choix, comme ses mises en rĂ©cit, fournissent Ă la chercheuse un matĂ©riau Ă partir duquel sont interrogĂ©es des conceptions de la mobilitĂ© et du territoire qui voudraient renverser la situation de relative assistance dans laquelle la sociologue trouve ses enquĂȘtĂ©s. Ă ce titre, les lieux de lâurgence sociale ne sont pas de simples pourvoyeurs de services de premiĂšre nĂ©cessitĂ© ; ils apparaissent avant tout comme des lieux de socialisation zonarde et de requalification symbolique pour les reprĂ©sentants de ces groupes par ailleurs largement disqualifiĂ©s. 15 La recherche sur la zone et ses expĂ©riences nâen est encore quâĂ ses balbutiements. Cette livraison dâEspaces et SociĂ©tĂ©s propose une premiĂšre articulation dâenquĂȘtes Ă partir desquelles sont retracĂ©es quelques-unes des cartes de significations » quâutilisent les zonards pour sâorienter dans leurs mondes [8]. Situer de tels rĂ©seaux de signifiance dans lâhistoire et les espaces de la zone nous a conduits Ă apprĂ©hender les diffĂ©rentes façons dont ses acteurs donnent du sens Ă leurs conduites comme aux styles de vie quâils ont privilĂ©giĂ©s ; pratiques fondĂ©es dans une certaine promotion de la solidaritĂ©, mais qui se paye parfois au prix fort de la rue, dont les duretĂ©s nâĂ©pargnent pas ceux qui disent lâavoir choisie et lâaimer. 16 Si les anthropo-logiques zonardes sont des visions du monde et des solutions pour le vivre, leur comprĂ©hension de lâintĂ©rieur constitue dans le mĂȘme temps une condition sine qua non pour Ă©tablir une base de dialogue capable de faire socle Ă une vĂ©ritable rencontre entre le monde des institutions et celui des zonards, lequel ne saurait ĂȘtre rĂ©duit Ă un espace oĂč rĂ©gnerait lâanomie. Tandis que les communitas quâils forment apparaissent au premier regard comme des contre-structures » dont les dĂ©rĂšglements se heurtent aux principes organisateurs de la sociĂ©tĂ© instituĂ©e Turner, 1990, les enquĂȘtes prĂ©sentĂ©es ici laissent apparaĂźtre les multiples points de jonction qui nous rapprochent dâeux. Voici sans doute lâune des questions fondatrices des sciences sociales Ă laquelle nous confronte lâĂ©tude de la zone. Car il en va ici comme de toute production dâaltĂ©ritĂ©, qui soit maximise la dissemblance pour la cĂ©lĂ©brer ou la condamner, soit insiste sur la ressemblance afin dâannihiler les diffĂ©rences. PlutĂŽt que de la refermer, ce dossier ambitionne de rĂ©vĂ©ler une nouvelle facette de cette question, quâil ne faut assurĂ©ment pas cesser dâouvrir. Notes [1] Atget EugĂšne, 1913, Zoniers, sĂ©rie de photographies rĂ©alisĂ©es Ă Paris entre 1899 et 1913, archivage sur le site internet de la BibliothĂšque nationale de France, [url consultĂ© le 14 avril 2017. [2] Beauchez a exposĂ© ailleurs la vision comme les dĂ©terminants biographiques de son enquĂȘte Beauchez, 2017. Tout comme Tristana Pimor a rĂ©flĂ©chi dans les colonnes dâEspaces et SociĂ©tĂ©s Ă ces formes de symĂ©trie dans lâinvestigation quâelle a coconstruite avec un groupe de zonards Pimor, 2016. [3] Sur le mĂȘme sujet, voir Ă©galement lâouvrage pionnier de Kevin Hetherington 2000 ou les photographies publiĂ©es par Traveller Dave Fawcett, qui a mis en images sa communautĂ© nomade et leurs façons dâhabiter en perpĂ©tuel voyage Fawcett, 2012. [4] Il sâagit de fĂȘtes techno tenues en plein air, le plus souvent sans autorisation et, donc, sur des terrains ou des champs squattĂ©s pour lâoccasion. [5] Cette importance de la rĂ©appropriation dâun territoire en tant quâancrage dâune identitĂ© positive â et non plus seulement dĂ©finie par la nĂ©gativitĂ© du dĂ©faut ou du manque â a Ă©tĂ© soulignĂ©e par Emmanuel Renault et Djemila Zeneidi Ă partir de lâenquĂȘte que celle-ci a menĂ©e pendant plusieurs annĂ©es dans une friche industrielle transformĂ©e en scĂšne artistique anarcho-punk Renault et Zeneidi-Henry, 2008. [6] New Babylon est une utopie architecturale pensĂ©e par Constant Nieuwenhuys, un artiste nĂ©erlandais fondateur du mouvement Cobra et compagnon de route de lâInternationale situationniste. LâidĂ©e fondatrice de la Nouvelle Babylone â Ă laquelle Constant a travaillĂ© de 1956 Ă 1974, influençant toute une gĂ©nĂ©ration dâarchitectes et dâurbanistes â est que les relations sociales doivent ĂȘtre au principe de lâĂ©dification spatiale dâune ville nomade, entiĂšrement montĂ©e sur pilotis et dont les configurations sont conçues comme perpĂ©tuellement mouvantes les bĂątiments sont modulables au grĂ© des situations que crĂ©ent les habitants Ă propos de lâĆuvre de Constant, voir Zegher et Wigley Ă©d., 2001. [7] Ou de documenter les compĂ©tences prĂ©caires », qui dĂ©signent les multiples savoir-faire et savoir-ĂȘtre, inĂ©galement protecteurs, acquis au cours de lâexpĂ©rience de la prĂ©caritĂ© par les acteurs sociaux disposant de faibles ressources Ă©conomiques, sociales et symboliques Bouillon, 2009, p. 203-213. [8] Au sens oĂč Stuart Hall et Tony Jefferson ont Ă©crit que les cartes de signification » maps of meaning consistent dans les aspects dâune subculture Ă partir desquels ses membres dessinent lâintelligibilitĂ© de leur environnement quotidien Hall et Jefferson Ă©d., 2006, p. 4. Une sociohistoire de la zone, espace de relĂ©gationLa zone, territoire de rĂ©sistances ?Tracer les cartes de significations » dâune subculture marginale RĂ©fĂ©rences bibliographiquesAngeras AnaĂŻs, 2012, Du nomadisme contemporain en France. Avec les saisonniers agricoles en camion, ouvrage ligneBeauchez JĂ©rĂŽme, 2017, Lâethnographe dans le sous-terrain fragments biographiques », Anthropologica, vol. 59, no 1, p. 101-113. En ligneBouillon Florence, 2009, Les mondes du squat. Anthropologie dâun habitat prĂ©caire, Paris, Presses universitaires de Patrick et Terrolle Daniel Ă©d., 2010, LâarriĂšre-cour de la mondialisation. 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Les personnes Ă haut potentiel ont un cerveau qui fonctionne Ă plein rĂ©gime, une sensibilitĂ© exacerbĂ©e, et une impression de vivre perpĂ©tuellement en marge. Et si cette diffĂ©rence nourrissait la sociĂ©tĂ© de demain ? PubliĂ© le 17/12/2014 Ă 1116 Temps de lecture 8 min Le cerveau dâun HP est en Ă©bullition permanente. Les IRM effectuĂ©es sur ces personnes confirment cette forte activitĂ©, avec une multitude de connexions neuronales qui se traduisent par une pensĂ©e en arborescence une idĂ©e en entraĂźnant une autre, puis une autre... Alors que chez les non-HP, seule une zone spĂ©cifique du cerveau sâanime par fonction, par exemple celle du langage pour traiter une information. Chez le surdouĂ©, penser, câest vivre. Il nâa pas le choix. Il ne peut arrĂȘter cette pensĂ©e puissante, incessante qui, sans relĂąche, scrute, analyse, intĂšgre, associe, anticipe, imagine, met en perspective⊠Aucune pause. Jamais. Alors, il pense sur tout, tout le temps, intensĂ©ment. Avec tous ses sens en alerte, explique la psychologue et auteur de livres sur le sujet, Jeanne Siaud-Facchin 1. Câest un petit vĂ©lo qui tourne sans cesse dans la tĂȘte. Jâai toujours vĂ©cu Ă cent Ă lâheure, en utilisant ce petit vĂ©lo au maximum, ce qui mâa permis de crĂ©er mon Ă©cole, confirme VĂ©ronique Meunier, 49 ans, qui a rĂ©ussi Ă rĂ©aliser ses rĂȘves malgrĂ© les critiques dont elle a fait lâobjet. Il y a vingt ans, elle a donc créé Les Ateliers de la Chaise Musicale, une Ă©cole de musique bruxelloise, caractĂ©risĂ©e par sa pĂ©dagogie diffĂ©rente, davantage axĂ©e sur des activitĂ©s ludiques et crĂ©atives que sur un apprentissage basĂ© sur la compĂ©tition. LâĂ©cole proposant aussi un Ă©veil musical dĂšs lâĂąge de 7 mois. On me disait quâun bĂ©bĂ© nâen avait rien Ă faire de la musique, que je faisais cela pour lâargent, que câĂ©tait dĂ©lirant. Et moi, jâĂ©tais convaincue quâil sâagissait dâun moyen de renforcer les liens parents-enfants et dâun bĂ©nĂ©fice Ă apporter aux petits. Penser sur le mode WikipĂ©dia Cette arborescence de la pensĂ©e, câest comme WikipĂ©dia, explique encore la directrice de la Chaise Musicale. Je consulte le site pour comprendre un mot ou un Ă©vĂ©nement, comme le krach boursier, et je me retrouve dans le fin fond de lâAustralie dans les annĂ©es 60, sans savoir comment jây suis arrivĂ©e. Ce sont des hyperliens sur tout et câest comme ça dans ma tĂȘte Ă©galement. La comparaison avec la plateforme de cette encyclopĂ©die participative en ligne est Ă©difiante. Les cerveaux des HP tournent non seulement Ă plein rĂ©gime, mais ils crĂ©ent aussi une multitude de liens entre les choses, que dâautres ne perçoivent pas forcĂ©ment. Avec une difficultĂ© qui consiste quelquefois Ă expliquer aux non-HP ce quâils perçoivent comme Ă©vident. CĂŽtĂ© bonus, il sâagit dâun moteur qui leur permet dâĂȘtre extrĂȘmement crĂ©atifs, innovants et de se surpasser. Quel est le bĂ©nĂ©fice de cette diffĂ©rence ? Une capacitĂ© Ă pouvoir travailler plus vite et facilement sur diffĂ©rents sujets Ă la fois. Cela me permet de produire plus au niveau professionnel. Mais je suis aussi trĂšs attentif Ă des dĂ©tails que dâautres ne perçoivent pas forcĂ©ment, avec une capacitĂ© Ă mâĂ©merveiller facilement et un besoin de trouver sans cesse de nouvelles idĂ©es. Jâai tendance Ă un peu charger la barque pour ne pas mâennuyer, explique Serge Ruyssinck, 48 ans, qui cumule son job de rĂ©alisateur Ă la RTBF Ă la gestion dâĂ©vĂ©nements pour la chaĂźne et Ă des prestations pour Eurosport, Ă Paris. Une sensibilitĂ© accrue Il y a quelques annĂ©es, Serge Ruyssinck a poussĂ© la porte dâun centre dâĂ©valuation des personnes Ă haut potentiel, parce quâil se rendait compte de sa mauvaise gestion Ă©motionnelle, particuliĂšrement dans sa vie privĂ©e. GuĂšre Ă©tonnant lâhypersensibilitĂ© est lâune des caractĂ©ristiques de cette diffĂ©rence. Avant, je me laissais submerger par mes Ă©motions. Je nâacceptais pas que les autres soient moins rapides que moi, cela mâirritait lorsquâon ne comprenait pas vite ce que je racontais, confie le rĂ©alisateur, qui estime sâĂȘtre â assagi â en saisissant mieux les diffĂ©rences comportementales et Ă©motionnelles propres aux HP. Aujourdâhui, son sens de lâempathie lui permet dâĂȘtre Ă lâĂ©coute de ses collaborateurs au niveau professionnel, mais aussi dans ses relations amicales. Un atout, selon lui. Mais pour en arriver lĂ , il faut parfois avoir fait du chemin. JâĂ©tais quelquâun de trĂšs empathique, une Ă©ponge Ă Ă©motions, je ressentais la souffrance dâautrui, mĂȘme sâil ne lâexprimait pas, explique de son cĂŽtĂ© VĂ©ronique Meunier, rĂ©vĂ©lĂ©e HP dans la foulĂ©e dâune demande de diagnostic pour son petit garçon. Depuis que jâai pris conscience que cette sensibilitĂ© fait partie des spĂ©cificitĂ©s des HP, jâai rĂ©ussi Ă dĂ©velopper des mĂ©canismes de protection et ça, câest extraordinaire, car je prends moins sur moi, avoue-t-elle. PrĂ©curseurs du monde de demain ? En dehors des politiciens ou artistes en tout genre, que deviennent les HP Ă lâĂąge adulte et quâapportent-ils de diffĂ©rent Ă la sociĂ©tĂ© ? Tout dĂ©pend de lâĂąge de leur diagnostic. Lorsquâils prennent conscience de leur altĂ©ritĂ© cognitive et quâils lâacceptent, ils passent gĂ©nĂ©ralement par une phase de reconstruction de leur personnalitĂ© et rĂ©alisent alors de grandes choses dans leur domaine de prĂ©dilection. La rĂ©vĂ©lation de leur douance joue souvent un rĂŽle de catalyseur identitaire, ce qui leur permet dâavancer et dâentreprendre. Une personne Ă haut potentiel qui assume sa diffĂ©rence va ĂȘtre Ă lâavant-garde de la crĂ©ation, de la recherche, de lâinnovation et des idĂ©es. Pour ĂȘtre crĂ©atif, donc ne pas refaire systĂ©matiquement tout ce que les autres font, il faut ĂȘtre un peu rebelle et avoir un sens critique fort dĂ©veloppĂ©, ne pas croire tout ce que lâon nous dit. Le monde avance grĂące Ă ces personnes aux idĂ©es hors du commun, qui voient des problĂšmes lĂ oĂč les autres nâen voient pas et qui imaginent des solutions. Les HP sont des gens qui veulent faire avancer le monde ou, au minimum, apporter leur pierre Ă lâĂ©difice, y compris dans les domaines les plus anonymes. Mais ne nous cachons pas il y a des â nids Ă HP â, notamment dans les milieux artistiques et mĂ©diatiques. La plupart des gens connus le sont, explique Thierry Biren. QI Ă©levĂ© et HP, quelle diffĂ©rence ? Les HP sont-ils des surdouĂ©s ? Ont-ils tous un QI plus Ă©levĂ© que la moyenne ? Selon le coach de lâassociation Douance, toutes les personnes dont le QI dĂ©passe le score de 128 sont HP. Mais ce ne serait pas la caractĂ©ristique la plus importante Ă prendre en considĂ©ration, car ce test dâintelligence trĂšs classique a Ă©tĂ© créé il y a un siĂšcle pour servir de rĂ©fĂ©rence en la matiĂšre. Il peut sâavĂ©rer rĂ©ducteur et finalement laisser passer des HP entre les mailles du filet normatif. Une personne qui aurait 125 de QI sera par exemple exclue du diagnostic classique, alors que ces quelques points de diffĂ©rence ont quelque chose dâartificiel, puisquâil sâagit dâune Ă©chelle Ă©tablie au siĂšcle dernier !, explique le coach. Cela ne signifie pas que cette personne nâest pas HP. Câest pourquoi je prĂ©fĂšre utiliser les tests qualitatifs pour Ă©tablir mon diagnostic. Lâimage que lâon se fait du surdouĂ© Ă lunettes qui rĂ©ussit ses Ă©tudes haut la main ne correspondrait finalement quâĂ un tiers des HP. Ce sont gĂ©nĂ©ralement ceux qui sollicitent davantage leur cerveau gauche, axĂ© sur le langage, le raisonnement et lâanalyse, alors que le cerveau droit que deux tiers des HP sollicitent en premier est associĂ© aux Ă©motions, Ă lâintuition et Ă la crĂ©ativitĂ©. La personne ĂŒber-intelligente et efficace serait, en revanche, celle qui mobilise autant son hĂ©misphĂšre droit que le gauche avec, dans un premier temps, le dĂ©bridement de la crĂ©ativitĂ© qui sâenclenche, puis dans un second temps, la capacitĂ© dâexĂ©cuter point par point quâelle a imaginĂ©. Câest pour cela quâil y a des juristes au Parlement qui font passer les propositions de lois imaginĂ©es par des politiciens dix ans auparavant !, commente Thierry Biren. Dans la pratique, la plupart des femmes et hommes politiques sont HP, dâoĂč les dĂ©bats houleux qui les opposent, car ils ont forcĂ©ment des idĂ©es diffĂ©rentes quâils veulent dĂ©fendre. Par rapport Ă cette guĂ©guerre sur la place Ă accorder aux tests de QI, la psychologue Jeanne Siaud-Facchin prĂ©cise que lâon confond souvent lâintelligence et la performance, les compĂ©tences et la rĂ©ussite, ainsi que le potentiel et lâefficacitĂ© intellectuelle. Alors que selon elle, ĂȘtre HP Ă©quivaut avant tout Ă un comportement psychoaffectif particulier et Ă une intelligence diffĂ©rente des autres. La vie en dĂ©calĂ© Beaucoup de HP vous le diront ils se sont toujours sentis en dĂ©calage par rapport aux autres, ce qui nâest pas forcĂ©ment facile Ă vivre. Du coup, certains ont dĂ©veloppĂ© un â faux-self â, câest-Ă -dire une adaptation de leur identitĂ© profonde pour se fondre dans la masse. Un effet camĂ©lĂ©on, inhibiteur de leur douance et souvent mal vĂ©cu⊠JâĂ©tais en dĂ©calage permanent avec tout le monde et la sociĂ©tĂ©. Pour moi, haut potentiel rimait avec hautement perturbĂ©e ! Une impression dâĂȘtre â trop â dans tout et que les choses nâĂ©taient jamais simples avec moi. Jâavais la volontĂ© de ne pas rentrer dans le rang, de ne pas rester prof dans le secondaire ou Ă lâacadĂ©mie, de ne pas obĂ©ir Ă des programmes qui ne me plaisaient pas, de pouvoir les crĂ©er moi-mĂȘme. Je nâĂ©tais pas consciente que je faisais cela parce que suis HP, mais je savais que je voulais faire les choses autrement, explique VĂ©ronique Meunier. Des annĂ©es plus tard, son Ă©cole ne dĂ©semplit pas. Elle avait vu juste ! Et comme un zeste dâutopie ne fait jamais de mal, on peut se demander si le monde actuel ne serait pas en train de fonctionner un peu plus quâauparavant selon des caractĂ©ristiques propres Ă lâhĂ©misphĂšre droit de notre cerveau, qui se traduisent actuellement par une envie croissante de changement sociĂ©tal, une dissĂ©mination de pratiques faisant appel Ă lâintelligence collective et Ă une dĂ©brouille crĂ©ative ? Certainement !, atteste Thierry Biren. Jâirais mĂȘme plus loin en rappelant que nous vivons dans un monde de plus en plus visuel, grĂące aux nouveaux mĂ©dias. On fait donc aujourdâhui davantage appel Ă des parties de notre intelligence que nous possĂ©dions dĂ©jĂ , mais qui nâĂ©taient pas autant sollicitĂ©es auparavant. Seul petit bĂ©mol cette Ă©volution nâest pas assez rapide pour ceux qui doivent encore sâadapter Ă un monde dont la logique de fonctionnement reste malgrĂ© tout celle de lâhĂ©misphĂšre gauche, de lâorganisation et de la rationalitĂ© efficace⊠Une question de temps ? 1 Auteure de plusieurs livres sur la douance, dont â Trop intelligent pour ĂȘtre heureux ? Lâadulte surdouĂ© â, Ă©d. Odile Jacob, 2012, 320 p., 23,20 âŹ. Le fil info La Une Tous Voir tout le Fil info Allez au-delĂ de l'actualitĂ© DĂ©couvrez tous les changements DĂ©couvrir Ă la Une Entretien Caroline DĂ©sir LâĂ©cole aujourdâhui câest bien plus quâune histoire dâenfants rois» Par Eric Burgraff et Charlotte Hutin Guerre en Ukraine Zelensky rĂ©clame la venue de lâAIEA Ă la centrale de Zaporijjia Une camionnette fonce sur une terrasse Ă Bruxelles un dĂ©sastre frĂŽlĂ© de quelques centimĂštres Par Arthur Sente et Louis Colart Europa League lâUnion Saint-Gilloise lancera sa campagne Ă Berlin le 8 septembre Energie la taxation des surprofits toujours dans les limbes Par Jean-François Munster Pessimistes, cinq banques abaissent leurs prĂ©visions de croissance pour la BelgiqueAumoment de la naissance de lâartiste par la valorisation de lâĂ©tude et du savoir, on rĂ©pugne Ă admettre dans la sociĂ©tĂ© des poĂštes un artisan, que la pratique et lâappĂ©tit du gain nĂ©cessaire Ă sa subsistance « rend comme esclave, et ne lui inspirent que des sentiments de bassesse et de subjection incompatible avec ceux dâun gentilhomme2 ».
Tour d'horizon de lâactualitĂ© littĂ©raire du moment Ă la dĂ©couverte de 5 bons romans Ă dĂ©vorer. Regardez-nous danser de LeĂŻla SlimaniAprĂšs avoir publiĂ© lâannĂ©e dernier Le Pays des autres , LeĂŻla Slimani poursuit sa saga marocaine en dĂ©voilant Regardez-nous danser. Si le premier livre relatait la rencontre, le mariage et lâinstallation dâune jeune Alsacienne sur les terres de son Ă©poux marocain, ce second tome dĂ©crypte, en particulier, lâĂ©volution de ses enfants, nettement plus privilĂ©giĂ©s, mais toujours tiraillĂ©s entre deux cultures et visions du monde sur fond de pĂ©riode 68. Soit une Ă©popĂ©e familiale au cĆur dâun Maroc en plein bouleversement politico-social et qui dĂ©crit avec finesse, ses contradictions, ses couleurs, ses mĆurs, ses paysages, ses odeurs et sa danser de LeĂŻla SlimaniConnemara de Nicolas Mathieu Il avait dĂ©jĂ remportĂ© le prix Goncourt avec Leurs enfants aprĂšs eux, Nicolas Mathieu revient cette annĂ©e avec Connemara. De son livre prĂ©cĂ©dent, on retrouve en exergue le Grand Est, mais aussi la question Ă©pineuse du dĂ©terminisme quand les rĂȘves dâadolescence se heurtent aux plafonds de verres sociaux et Ă la rĂ©alitĂ© dâun monde capitaliste oĂč le tertiaire s'impose dans des milieux modestes. Entre passĂ© et prĂ©sent, dâados boudeurs qui subissent les limites dâune rĂ©gion isolĂ©e, rĂ©veillĂ©s par leur dĂ©sir, aux adultes Ă la vie familiale plus ou moins satisfaisantes. Les descriptions sont d'une justesse rare. Connemara de Nicolas Mathieu La fille de Deauville de Vanessa SchneiderLe dernier roman de Vanessa Schneider propulse les lecteurs au coeur de l'Ă©popĂ©e d'Action directe. Ce groupe terroriste communiste formĂ© dans les annĂ©es 80 qui multiplie alors les attentats, braquages et autres actes de terreur Ă travers la France. Avec en particulier Ă sa tĂȘte une jeune femme surnommĂ©e par la police la fille de Deauville », nĂ©e dans un quartier cossu, de sa tracte Ă son arrestation. Ou comment raconter la violence de cette rĂ©volution utopiste, entre rĂȘves de libertĂ© et revanches sociales. Prenant. La fille de Deauville de Vanessa SchneiderNom de Constance DebrĂ© "Jâai un programme politique. Je suis pour la suppression de lâhĂ©ritage, de lâobligation alimentaire entre ascendants et descendants, je suis pour la suppression de lâautoritĂ© parentale, je suis pour lâabolition du mariage, je suis pour que les enfants soient Ă©loignĂ©s de leurs parents au plus jeune Ăąge". AprĂšs Play boy oĂč elle faisait son coming out et Love Me tender oĂč elle dĂ©cryptait son rapport Ă l'amour maternel, Constance DebrĂ© dĂ©voile, ce printemps, Nom. Une autofiction toujours aussi engagĂ©e qui explore l'enfance et notre rapport compliquĂ© Ă cette derniĂšre. Si l'on est pas toujours d'accord sur tout, elle soulĂšve des problĂ©matiques et questions intĂ©ressantes. Le rĂŽle discutable que la psychanalyse lui dĂ©die, nos rapports Ă nos parents⊠Et invite, en parallĂšle Ă considĂ©rer son mode de vie quasi nihiliste en marge de notre sociĂ©tĂ© consumĂ©riste. Nom de Constance DebrĂ© AnĂ©antir de de Michel Houellebecq Attendus comme le messie, les livres de Michel Houellebecq sont partout dĂšs la premiĂšre seconde de leur sortie. Globalement plus boudĂ© par la critique que ses romans prĂ©cĂ©dents, lâauteur nous propulse dans les annĂ©es 2027, en plein pĂ©riode Ă©lectorale, mĂȘlĂ©e Ă une crise familiale complexe et des attaques informatiques. Les amateurs de la plume et du cynisme Houellebecquiens apprĂ©cieront sĂ»rement. AnĂ©antir de de Michel Houellebecq Retrouvez sur le 5 livres fĂ©ministes qu'il faut avoir lus dans sa vieLes cinq Ă©crivaines françaises les plus prometteuses du moment
Lephotographe Antoine Bruy est parti Ă la rencontre de ceux qui ont choisi de vivre en marge des villes et de leurs fracas. Câest autant une sĂ©rie de portraits que le carnet de bord dâuneActualitĂ© SociĂ©tĂ© Climat et transitions L'Ă©tat d'urgence a eu raison de la mobilisation. En raison de l'Ă©tat d'urgence dĂ©crĂ©tĂ© aprĂšs les attentats de Paris, le gouvernement a dĂ©cidĂ© de "ne pas autoriser" les marches pour le climat prĂ©vues les 29 novembre, veille de l'ouverture de la COP21, et le 12 dĂ©cembre, lendemain de la clĂŽture de cette confĂ©rence. La manifestation du 29 novembre devait ainsi se tenir entre les places de la RĂ©publique et de la Nation, via le boulevard Voltaire, dans le quartier oĂč ont eu lieu les attentats du vendredi 13 novembre. Juliette Rousseau, la coordinatrice de la Coalition climat 21, chargĂ©e de l'organisation de cette marche, a rĂ©agi Ă cette interdiction Regrettez-vous la dĂ©cision prise par le gouvernement d'annuler les marches citoyennes en marge de la COP21? Offre limitĂ©e. 2 mois pour 1⏠sans engagement Bien sĂ»r que nous la regrettons. Nous travaillons depuis un an et demi comme des fous sur ces Ă©vĂ©nements, et maintenant il nous faut tout rĂ©inventer en l'espace de 10 jours. Plusieurs dizaines de milliers de personnes Ă©taient attendues Ă Paris. C'est un vĂ©ritable coup dur pour nous. D'autant plus que nous espĂ©rions que le gouvernement propose des alternatives Ă cette interdiction, mais ils ne l'ont pas fait. >> Suivez les Ă©volutions de l'enquĂȘte avec notre direct Quoiqu'il en soit, les gens vont continuer Ă se mobiliser. Plusieurs dizaines de manifestations sont attendues partout en France. A priori, certaines municipalitĂ©s de province pourraient autoriser ces marches, c'est notamment le cas pour Strasbourg ou Rennes. On attend des rĂ©ponses des autres villes, mais on reste optimiste. Ne craignez nous pas que ces interdictions vous nuisent, en rĂ©duisant la portĂ©e de votre message? On aurait pu le craindre en effet, mais paradoxalement, nous n'avons jamais bĂ©nĂ©ficiĂ© d'autant de couverture mĂ©diatique que depuis que ces interdictions ont Ă©tĂ© prononcĂ©es. Au mĂȘme titre que tout le monde, nous allons nous adapter Ă ces tragiques Ă©vĂ©nements. Nous allons reformuler notre mobilisation, mais nous n'allons pas l'annuler. Cela va nous pousser Ă rĂ©flĂ©chir Ă de nouveaux modes d'action. Vous avez dit qu'il vous faudrait faire preuve de "crĂ©ativitĂ©" dans votre mobilisation maintenant. Par quoi cela va-t-il passer? Depuis hier, nous nous sommes rĂ©unis avec des artistes et des militants pour rĂ©flĂ©chir Ă cela. A Paris, nous allons surement proposer des manifestations plus visuelles, plus sonores, et plus symboliques. Les plus lus OpinionsLa chronique de Vincent PonsVincent Pons, avec Boris VallĂ©eLa chronique de Marion Van RenterghemPar Marion Van RenterghemLa chronique de Sylvain FortPar Sylvain FortLa chronique du Pr Gilles PialouxPar le Pr Gilles Pialoux
Marcel Duchamp Ă©voque son rapport Ă l'art et Ă la vie. Loin du sĂ©rieux des musĂ©es et des galeries d'art contemporain, il exprime un esprit ludique. Marcel Duchamp demeure une figure incontournable des avant-gardes artistiques. Une sĂ©rie dâentretiens avec Pierre Cabanne, publiĂ©s en 1967, sont rééditĂ©s. Lâartiste, ĂągĂ© de 79 ans, revient sur son refus du petit bonheur conformeLa principale Ćuvre dâart de Marcel Duchamp, câest surtout sa vie. Ses crĂ©ations lui ont surtout permis un refus du travail. Je considĂšre que travailler pour vivre est un peu imbĂ©cile au point de vue Ă©conomique. JâespĂšre quâun jour on arrivera Ă vivre sans ĂȘtre obligĂ© de travailler », affirme Marcel Duchamp. Il a refusĂ© le petit mode de vie bourgeois avec ses contraintes et son confort superficiel, de ce que lâon appelle une femme, des enfants, une maison de campagne, une automobile ».Marcel Duchamp nĂ© en 1887, dans la bonne bourgeoisie normande. En 1905, il devient ouvrier dâart et imprime des gravures pour ĂȘtre dispensĂ© de deux ans de service militaire. Sa candidature Ă lâĂcole des beaux-arts est refusĂ©e. Absolument, et jâen suis fier maintenant », commente Marcel Duchamp. Mais, Ă lâĂ©poque, il apparaĂźt comme un jeune bourgeois conformiste qui ne fuit pas encore le petit milieu artistique mais aspire au contraire Ă sây intĂ©grer. Il dĂ©couvre le fauvisme et le cubisme. Il frĂ©quente Montmartre, lâĂ©picentre de la vie artistique. Guillaume Apollinaire et Picasso frĂ©quentent ce quartier qui abrite surtout une bohĂȘme artistique en marge de la routine du quotidien et sans soucis du lendemain. On fait de la peinture parce quâon veut soi-disant ĂȘtre libre. On ne veut pas aller au bureau tous les matins », prĂ©cise Marcel Duchamp. En 1909, il expose, pour la premiĂšre fois, deux toiles au Salon des indĂ©pendants. La curiositĂ© guide ce bouillonnement câest surtout la rencontre avec Francis Picabia qui Ă©loigne Marcel Duchamp du milieu des peintres professionnels. Loin de tout conformisme, Picabia vit dans lâexcĂšs de lâalcool et de lâopium. Lâexistence dâun artiste consiste Ă vivre intensĂ©ment. Marcel Duchamp refuse le petit bonheur conforme avec femme et enfants pour embrasser pleinement la vie dâartiste. Il refuse de sâenferme dans le cadre du couple et du mariage, avec la routine qui va avec. Il y avait une question de budget qui intervenait, et un raisonnement trĂšs logique il fallait choisir entre faire de la peinture ou autre chose. Ătre lâhomme de lâart, ou se marier, avoir des enfants, une maison de campagne⊠», dĂ©crit Marcel artiste novateur et dilettanteLe Nu descendant un escalier apparaĂźt comme une provocation Ă©rotique pour le petit milieu artistique. Entre 1912 et 1913, ses peintures dont les titres Ă©voquent lâĂ©rotisme se multiplient, Ă lâimage de La MariĂ©e mise Ă nu par les cĂ©libataires. Les titres de ses Ćuvres rĂ©vĂšlent des jeux de langage, souvent humoristiques. Lâartiste utilise des objets et de nouveaux matĂ©riaux, comme le verre. Marcel Duchamp invente le ready made qui permet de construire une Ćuvre dâart Ă partir dâobjet. Si les conservateurs et autres historiens insistent sur la dimension conceptuelle, Marcel Duchamp Ă©voque plutĂŽt une inspiration ludique. Le hasard doit permettre de sortir du conditionnement et de la routine esthĂ©tique. Le choix des ready-made est toujours basĂ© sur lâindiffĂ©rence visuelle en mĂȘme temps que sur lâabsence totale de bon ou de mauvais goĂ»t », prĂ©cise Marcel Duchamp. La crĂ©ation peut alors sortir de lâĂ©touffoir de lâ Duchamp part vivre Ă New York. Il est dĂ©jĂ connu comme lâauteur du Nu descendant un escalier. Il frĂ©quente des peintres et des poĂštes, mais pas Arthur Cravan. Marcel Duchamp recherche moins la reconnaissance que la provocation et le scandale Ă travers ses Ćuvres. Il dĂ©couvre le mouvement Dada qui se rapproche de cette dĂ©marche. Son ami Picabia dĂ©veloppe ce mouvement aux Ătats-Unis, de maniĂšre plutĂŽt agressive et anti-art. Il sâagissait surtout de remettre en question le comportement de lâartiste tel que lâenvisageaient les gens. LâabsurditĂ© de la technique, des choses traditionnelles », dĂ©crit Marcel Duchamp. Dada se diffuse aux Ătats-Unis Ă travers des bulletins comme TNT revue explosive. Des textes permettent de faire connaĂźtre la fameuse Ćuvres de Marcel Duchamp coĂ»tent aujourdâhui chacune une vĂ©ritable fortune. A lâĂ©poque, elles se vendent dĂ©jĂ Ă plusieurs milliers de dollars. Pourtant, il nâen touche pas un centime. Il peut donner une Ćuvre pour payer le loyer, mais il ne crĂ©e pas dans une logique financiĂšre et professionnelle. Il donne quelques cours de français et vend ses anciennes Ćuvres pour toucher un petit revenu. Mais il sâaccommode dâune vie de bohĂȘme et de misĂšre. Vivre avec peu dâargent ne lâempĂȘche pas dâĂȘtre immergĂ© dans le bouillonnement culturel de New York. Mais, en 1918, le patriotisme triomphe avec lâentrĂ©e en guerre des Ătats-Unis. Lâartiste rejoint alors lâArgentine pour Ă©chapper Ă ce climat Duchamp retourne Ă Paris en 1919. Il retrouve Picabia et la bande des dadaĂŻstes français. La Joconde crĂ©e un nouveau scandale. Marcel Duchamp rajoute une moustache et une barbiche au tableau de LĂ©onard de Vinci pour le dĂ©sacraliser. Il rajoute les lettres Ă lire phonĂ©tiquement. Il crĂ©e Ă©galement un personnage auquel il identifie, pour changer de sexe Rrose SĂ©lavy. DĂšs 1922, AndrĂ© Breton Ă©crit un article sur Marcel Duchamp dans la revue LittĂ©rature. Les surrĂ©alistes contribuent Ă faire de sa dĂ©marche la figure originelle des avant-gardes Duchamp prĂ©sente sa conception originale de lâart. Pour lui, une Ćuvre doit choquer. La rĂ©ception du public semble aussi importante que lâacte de crĂ©ation. Marcel Duchamp ne frĂ©quente pas les musĂ©es et rejette les modes passagĂšres. Pourtant, il accepte que ses Ćuvres soient exposĂ©es dans des musĂ©es. Jâai acceptĂ© parce quâil y a des choses pratiques dans la vie quâon ne peut pas empĂȘcher. Je nâallais pas refuser. Jâaurais pu les dĂ©chirer ou les casser, cela aurait Ă©tĂ© aussi un geste idiot », se justifie lâ vie comme Ćuvre dâartMarcel Duchamp rejette les valeurs bourgeoises, la culture et lâhistoire de lâart dans laquelle il refuse de se plonger sĂ©rieusement. Jâaurais voulu travailler, mais il y avait en moi un fond de paresse Ă©norme. Jâaime mieux vivre, respirer, que travailler », prĂ©cise Marcel Duchamp. Il se moque Ă©galement du modĂšle de la rĂ©ussite sociale et de la reconnaissance artistique. PlutĂŽt que de se rĂ©fĂ©rer Ă lâutilitĂ© du travail, il prĂ©fĂšre se laisser bercer par les plaisirs de la vie. Je ne considĂšre pas que le travail que jâai fait puisse avoir une importance quelconque au point de vue social dans lâavenir. Donc, si vous voulez, mon art serait de vivre », exprime Marcel ne reste mariĂ© que 6 mois. Il refuse de sâenfermer dans le carcan de la famille, avec une femme et des enfants, et rentrer dans un mode de vie plus conformiste. La famille qui vous force Ă abandonner vos idĂ©es rĂ©elles pour les tronquer contre des choses acceptĂ©es par elle, la sociĂ©tĂ© et tout le bataclan ! », estime Marcel Duchamp. Il insiste Ă©galement sur la dimension Ă©rotique de son Ćuvre, contre la religion et les rĂšgles Duchamp permet de sortir lâart de la banale peinture Ă lâhuile pour orner les murs dâun salon bourgeois. Lâartiste utilise surtout des objets. Lâart prend davantage la forme dâun signe, si vous voulez ; il nâest plus ravalĂ© au niveau de la dĂ©coration ; câest ce sentiment qui a dirigĂ© ma vie », prĂ©cise Marcel prĂ©faces des diverses Ă©ditions de ses entretiens rĂ©alisĂ©s en avril 1966 Ă©voquent lâimportance de Marcel Duchamp, au-delĂ des diverses interprĂ©tations et commentaires des historiens de lâart. A travers ses actes de crĂ©ateur Marcel Duchamp nâa pas voulu imposĂ© un langage rĂ©volutionnaire nouveau, mais proposer une attitude de lâesprit ; câest pourquoi ces entretiens constituent une Ă©tonnante leçon de morale », observe Pierre Cabanne. Issu de la petite bourgeoisie, lâartiste se libĂšre progressivement de sa famille, de son milieu, de son Ă©poque, de lâart de son temps avec ses normes et ses moyens traditionnels. Sa principale Ćuvre dâart demeure sa vie, puisquâil a tentĂ© dâĂ©chapper au travail et aux contraintes sociales. Sa non-activitĂ© semble ludique et il conçoit lâart comme un jeu et une pratique une deuxiĂšme prĂ©face, datĂ©e de 1976, Pierre Cabanne Ă©voque la rĂ©ception de ses entretiens. Les propos de Marcel Duchamp ont scandalisĂ© le petit milieu mĂ©diatique et artistique. Lâartiste dĂ©clare vivre comme un garçon de cafĂ© » et semble dĂ©tachĂ© et indiffĂ©rent par rapport Ă son propre mythe. Loin du peintre hautain et avide de reconnaissance, il insiste sur son rapport ludique Ă lâart et Ă la vie. Les journalistes et historiens dâart prĂ©fĂšrent un Duchamp momifiĂ© et aseptisĂ© pour se contenter de commenter ses Ćuvres de maniĂšre pĂ©dante et dâune dĂ©marche ludiqueLa dĂ©marche de Marcel Duchamp se rapproche de celle de John Cage. Cet artiste rĂ©invente lâexpĂ©rimentation musicale. Moira Roth le rencontre entre 1971 et 1973 pour sa thĂšse en histoire de lâart intitulĂ©e Marcel Duchamp et lâAmĂ©rique, 1914-1973 ». Elle est accompagnĂ©e par William Roth, son mari, sociologue et cinĂ©aste pour rĂ©aliser un Cage, comme Marcel Duchamp, accorde une grande importance au hasard dans la crĂ©ation. Il propose des opĂ©rations Cage confirme le dĂ©tachement de Marcel Duchamp Ă lâĂ©gard de lâargent et du travail. Lâartiste refuse de vendre ses Ćuvres, Ă une Ă©poque au cours de laquelle se dĂ©veloppe un marchĂ© de lâart trĂšs lucratif. Pour vivre, il se contente de petits boulots. Il considĂ©rait lâattitude bourgeoise qui consiste Ă avoir un travail et Ă gagner de lâargent et ainsi de suite comme une perte de temps », confirme John Cage et Marcel Duchamp semblent Ă©galement indiffĂ©rents Ă la critique ou Ă la reconnaissance de leurs Ćuvres par le public ou les spĂ©cialistes. Je pense que la sociĂ©tĂ© est lâun des plus grands obstacles quâun artiste puisse rencontrer », estime John Cage. Il dĂ©nonce Ă©galement le public, comme un groupe de consommateurs de spectacles. La sĂ©paration et la hiĂ©rarchie entre lâartiste et le public doit ĂȘtre brisĂ©e. Je suis ici pour brouiller les distinctions entre lâart et la vie - comme je pense que Duchamp lâĂ©tait aussi - et entre lâenseignant et lâĂ©lĂšve, et entre lâinterprĂšte et la public, etc. », prĂ©cise John rapport ludique et humoristique Ă la vie semble Ă©galement relier les deux artistes. Cette dĂ©marche influence notamment Fluxus. Il prenait le fait de sâamuser trĂšs au sĂ©rieux. Et lâatmosphĂšre autour de lui Ă©tait toujours au divertissement », tĂ©moigne John Cage. La vie sâapparente Ă un jeu, tournĂ© vers le plaisir. Il Ă©tait parfaitement prĂȘt Ă ce que la vie nâait pas dâautre sens que de sâamuser », souligne John Cage. Marcel Duchamp dĂ©veloppe des idĂ©es libertaires. Il sâoppose Ă la politique, mais surtout Ă sa dĂ©rive professionnelle Ă travers la dĂ©mocratie reprĂ©sentative. Il dĂ©nonce la pollution et les consĂ©quences du capitalisme. Il aspire surtout Ă rendre la vie joyeuse et jouissive. Et il Ă©tait pour le sexe et lâhumour. Et il Ă©tait opposĂ© Ă la propriĂ©tĂ© privĂ©e », prĂ©cise John sociĂ©tĂ© bourgeoise cĂ©lĂšbre aujourdâhui Marcel Duchamp. Une exposition sâorganise au Centre Pompidou Ă partir du 24 septembre 2014. Comme pour Guy Debord, la rĂ©cupĂ©ration et la musĂ©ification permettent de dĂ©samorcer la charge subversive dâune dĂ©marche qui attaque les normes dominantes. Marcel Duchamp nâest pas un rĂ©volutionnaire. Il nâĂ©voque jamais les luttes sociales et semble se dĂ©sintĂ©resser du mouvement ouvrier. Il devient facile de le cantonner Ă la sphĂšre artistique. Mais Marcel Duchamp exprime surtout un Ă©tat dâesprit de rĂ©volte joyeuse, dâindividualisme hĂ©doniste et de provocation ludique. Il mĂ©prise les normes de la sociĂ©tĂ© marchande comme lâargent et le travail. Il refuse de se fondre dans le moule du petit bonheur conforme et de la rĂ©ussite sociale. Avoir de lâargent et faire carriĂšre semble moins important que jouir de la vie. Mais cette dĂ©marche peut devenir inoffensive lorsquâelle se rĂ©duit Ă choisir un banal mode de vie qui se complaĂźt dans la marginalitĂ©. Seule une transformation de la sociĂ©tĂ© peut permettre Ă chacun de vivre Articles liĂ©s Pour aller plus loin VidĂ©o Viva Dada, documentaire diffusĂ© sur Arte le 14 fĂ©vrier 2016Revue de presse sur le livre de Marcel Duchamp sur le site des Ă©ditions AlliaRevue de presse sur le livre de John Cage sur le site des Ă©ditions Allia
Laprochaine sĂ©ance des Doctoriales se tiendra sur Zoom et sur inscription (en Ă©crivant Ă contact.doctoriales.serd@gmail.com) le samedi 12 dĂ©cembre de 10h30 Ă 12h30. Elle sera composĂ©e de deux communications : âLe cirque entre marginalitĂ© et culture de masseâ de LĂ©a de Truchis (UniversitĂ© Paul ValĂ©ry Montpellier 3) et ââDâun cĂŽtĂ© lâunivers et de lâautre
Texte de Mathieu Saujot, chercheur Ă lâIDDRI, Sarah Thiriot, sociologue Ă lâAdemeEn 2020, Bon Pote prĂ©sentait les 12 excuses de lâinaction climatique et les maniĂšres dây rĂ©pondre, sur la base dâun article scientifique qui a depuis touchĂ© une forte audience. Dans ce travail, 12 discours de dĂ©lai, qui acceptent la rĂ©alitĂ© du changement climatique mais justifient lâinaction ou des actions inadĂ©quates », Ă©taient identifiĂ©s et analysĂ©s. Parmi les diffĂ©rents types dâactions Ă mener pour faire face au changement climatique, la question des modes de vie plus durables nous semble ĂȘtre particuliĂšrement sujette Ă ce type de discours. Les rĂ©actions au concept de sobriĂ©tĂ© en sont un bon exemple. Celui-ci apparaĂźt souvent comme un tabou qui peut ĂȘtre soit Ă©cartĂ© soit diluĂ© en jouant sur la confusion avec lâefficacitĂ© ou encore neutralisĂ© en renvoyant vers la dĂ©croissance. On se trouve donc dans une situation oĂč de plus en plus de dĂ©clarations politiques reconnaissent la nĂ©cessitĂ© de faire Ă©voluer nos modes de vie, mais oĂč des obstacles se prĂ©sentent dĂšs que lâon aborde concrĂštement les changements Ă mettre en Ćuvre. Prendre en compte ces prĂ©occupations et savoir y rĂ©pondre Faire ce travail dâidentification des arguments de rĂ©sistance au changement et des rĂ©ponses possibles Ă apporter nâest pas seulement un enjeu de communication politique il rĂ©vĂšle des Ă©lĂ©ments sur ce que reprĂ©sente changer les modes de vie et ce quâil faut mettre en Ćuvre collectivement pour que cela devienne possible, acceptable, auteurs de lâarticle sur les 12 discours dâinaction climatique soulignent que ces derniers sâappuient sur les prĂ©occupations et les craintes lĂ©gitimes ⊠Nous soutenons quâils deviennent des arguments dilatoires lorsquâils dĂ©forment plutĂŽt que de clarifier, soulĂšvent lâadversitĂ© plutĂŽt que le consensus ou laissent entendre que prendre des mesures est un dĂ©fi impossible. ».Nous cherchons donc Ă rĂ©pondre Ă ces arguments afin de progresser dans notre capacitĂ© Ă rendre possibles ces changements de modes de vie. Pour cela il nous paraĂźt essentiel dâĂ©clairer et orienter le dĂ©bat avec les acquis et connaissances des sciences humaines et sociales. 1. Ces changements ne sont pas acceptablesCet argument dĂ©crĂ©dibilise une action climatique qui passerait par des changements de modes de vie en considĂ©rant quâils ne seraient pas acceptables par la population. On pense gĂ©nĂ©ralement ici Ă changer sa mobilitĂ©, son chauffage, ses pratiques de consommation et alimentaire, sa maniĂšre de faire du tourisme, dâutiliser le numĂ©rique⊠â RĂ©ponses possibles âInverser la charge de la preuve Cet argument comme dâautres fonctionne car il Ă©vacue la situation actuelle et reporte totalement la charge de la preuve sur le projet de transition. Dire que ces changements ne sont pas acceptables fait passer implicitement lâidĂ©e que nos modes de vie actuels ne posent pas de question, et que seule la transition pose problĂšme. Or câest bien Ă©videmment faux. Nos modes de vie sont dĂ©jĂ associĂ©s Ă des choses qui, lorsquâelles sont identifiĂ©es et dĂ©noncĂ©es notamment par des ONG, suscitent des dĂ©bats dans la sociĂ©tĂ©. Pensons par exemple Ă lâimpact de ce que rĂ©vĂšlent des associations comme L214 sur ce quâimpliquent concrĂštement pour le bien-ĂȘtre des animaux nos pratiques alimentaires actuelles, reposant sur la large disponibilitĂ© de produits animaux peu coĂ»teux. Pensons Ă©galement aux manquements de lâindustrie textile en termes de droit social, par exemple avec lâeffondrement dâune usine en 2013 Ă Dacca, causant plus de 1000 morts parmi les ouvriers et ouvriĂšres. Cet Ă©vĂ©nement a Ă©tĂ© associĂ© Ă la pression quâexerce sur la main dâĆuvre le besoin de produire Ă faible coĂ»t dans une logique de fast fashion, ce qui renvoie in fine Ă nos pratiques vestimentaires. Et au quotidien, nos maniĂšres de nous dĂ©placer, fortement dĂ©pendantes de la voiture thermique, impliquent un haut niveau de pollution de lâair dans les mĂ©tropoles, au dĂ©triment de la santĂ© de leurs dĂ©plorer les impacts nĂ©gatifs de nos modes de vie actuels nâĂ©quivaut pas Ă rendre acceptable tout changement futur. Mais cela doit permettre dâouvrir la discussion sur une base Ă©quitable nos modes de vie actuels ont leurs qualitĂ©s comme leurs dĂ©fauts, ils posent Ă©galement des enjeux moraux et Ă©thiques quâil convient de mettre Ă jour. Cet examen rééquilibrĂ© incite Ă penser le changement. Les dĂ©bats quâil peut susciter au sein de la sociĂ©tĂ© sont certainement une voie de progrĂšs. Nos prĂ©fĂ©rences sont mallĂ©ables Quâest ce qui est inacceptable ? Le rĂ©sultat ou les moyens ? Nous faisons souvent face Ă cette question est-ce que la sobriĂ©tĂ© est acceptable ? Comme si on pouvait rĂ©pondre de but en blanc face Ă un concept qui nâa rien dâĂ©vident. Prenons un exemple si par un bon matin pluvieux, tout dâun coup, vous tendez un vĂ©lo Ă votre voisin automobiliste invĂ©tĂ©rĂ© pour rĂ©aliser les 5 kilomĂštres qui le sĂ©parent de son travail, il y a effectivement de fortes chances quâil trouve cela inacceptable. Si ce mĂȘme moment arrive aprĂšs 6 mois oĂč se sont succĂ©dĂ©s lâinauguration dâune nouvelle voie verte dans son village pĂ©riurbain, le test dâun vĂ©lo Ă©lectrique Ă son travail, un rendez-vous avec son mĂ©decin lâalertant sur sa trop grande sĂ©dentaritĂ©, une discussion avec ses enfants qui utilisent leur vĂ©lo sur leur lieu dâĂ©tude⊠et lâachat dâun bon impermĂ©able ! ; alors la rĂ©ponse sera certainement cette variation ? Tout simplement car nos prĂ©fĂ©rences, nos reprĂ©sentations de ce qui est possible, positif, dĂ©sirable sont mallĂ©ables, comme cela a Ă©tĂ© rappelĂ© dans le rĂ©cent rapport du GIEC[1]. Ces Ă©volutions peuvent ĂȘtre stimulĂ©es par un ensemble de leviers dans les mains des dĂ©cideurs politiques, des dĂ©cideurs privĂ©s et des citoyens. Pour le vĂ©lo par exemple, le schĂ©ma ci-dessous et le dossier complet sur Bon Pote permettent dâidentifier lâensemble de ces travail menĂ© par lâAdeme autour de la prospective âTransitions2050â pour mettre en discussion ces choix de sociĂ©tĂ© auprĂšs dâune trentaine de Français et Françaises est Ă©galement riche dâenseignements. Dâabord, il montre que lâon ne peut poser cette question de lâacceptabilitĂ© sans rendre concrets et prĂ©hensibles plusieurs futurs possibles. Il montre Ă©galement que les scĂ©narios activant davantage la sobriĂ©tĂ© ne sont pas moins acceptables que les scĂ©narios qui parient sur dâimportants dĂ©ploiements technologiques pour prĂ©server nos modes de consommation changer nos modes de vie, de consommation, de dĂ©placement nâest pas sans poser de question, mais les faire perdurer au prix de technologies lourdes soulĂšve Ă©galement tout un ensemble dâincertitudes aux yeux des citoyens. Cela rejoint lâidĂ©e dâaller au-delĂ du terme dâacceptabilitĂ© pour mieux comprendre ce qui se joue derriĂšre ce terme la dĂ©sirabilitĂ© des scĂ©narios, leur faisabilitĂ© et enfin les conditions de rĂ©alisation nĂ©cessaires Ă leur mise en Ces changements sont socialement injustes Cet argument sâinscrit dans la logique des critiques contre une Ă©cologie dite âpunitiveâ. Elle sâappuie sur une forme de simplification la transition se ferait par principe au dĂ©triment des plus vulnĂ©rables, et notamment quand on cherche Ă rĂ©orienter les comportements et les modes de vie. Lâexemple de la taxe carbone, rĂ©el voir ces travaux qui montrent lâimpact inĂ©galitaire et notre article sur la question, permet alors de disqualifier lâensemble du projet de transition. â RĂ©ponses possibles âDes inĂ©galitĂ©s bien rĂ©elles⊠mais le plus souvent indĂ©pendantes de la transition Encore une fois, cet argument a tendance implicitement Ă rejeter sur les porteurs de la transition les inĂ©galitĂ©s et problĂšmes sociaux actuels. La crise des Gilets jaunes, qui a notamment mis en exergue la dĂ©pendance Ă la voiture et la vulnĂ©rabilitĂ© aux prix du carburant problĂšme identifiĂ© par la recherche dĂšs les annĂ©es 2000-2010, avant que la taxe carbone ne soit mise en place, le mal-logement et la lutte contre les passoires Ă©nergĂ©tiques voir le collectif RĂ©novons, et lâalimentation avec les enjeux de prĂ©caritĂ© et dâinsĂ©curitĂ© alimentaire qui touchent des millions de voir le rĂ©cent rapport de 7 sur la question montrent que nos sociĂ©tĂ©s sont dĂ©jĂ tiraillĂ©es par des inĂ©galitĂ©s et des souffrances sociales. Le premier vecteur dâinĂ©galitĂ©s nâest pas la transition, mais bien les politiques actuelles et ce que les politiques passĂ©es ont créé. Dans ce contexte, sâil est important de sâinterroger sur les potentiels impacts nĂ©gatifs de la transition, celle-ci peut aussi ĂȘtre vue comme une source de solutions. De fait, , les travaux de recherche sur les modes de vie durables et les propositions associĂ©es adoptent de plus en plus une approche mettant au cĆur de leur rĂ©flexion les enjeux de justice sociale, dâĂ©quitĂ© et dâĂ©galitĂ©. Ils partent du principe quâil faut sâassurer des besoins de base pour tous avec les concepts de social floor », de basic needs », de social threshold », qui dessineraient un cadre vecteur de progrĂšs pour les plus modestes. Ces travaux pointent Ă©galement que les efforts les plus importants seront certainement du cĂŽtĂ© de ceux qui aujourdâhui ont les revenus les plus Ă©levĂ©s et de facto consomment plus et Ă©mettent plus. Le cas de lâavion est emblĂ©matique car une minoritĂ© de la population reprĂ©sente la majoritĂ© des vols, ce qui fait quâune mesure comme une taxe qui croĂźt avec la frĂ©quence de vol impacterait avant tout les plus aisĂ©s. Pour un bon rĂ©sumĂ© de ce que dit la recherche sur la question de lâĂ©quitĂ© dans la transition des modes de vie, voir cet nouveaux cadres dâactions publiques Ă construire Penser la transition de maniĂšre Ă ce quâelle nâimpacte pas les plus vulnĂ©rables et quâelle soit au contraire un progrĂšs social est Ă©videmment essentiel et peut aussi ĂȘtre explorĂ© au niveau sectoriel. Concernant lâagriculture et lâalimentation, il faut Ă la fois penser les Ă©volutions des filiĂšres, le revenu des agriculteurs et les mĂ©nages les plus contraints, ce qui implique dâanticiper les politiques publiques nĂ©cessaires. Sur cet exemple, des solutions existent et peuvent ĂȘtre mises en place. Ce nâest donc pas un dĂ©fi philosophies dâaction pour assurer lâaccessibilitĂ© Ă©conomique dâune alimentation saine et durable. Blog IDDRIAu-delĂ des idĂ©es reçuesIl est Ă©galement crucial dâaller au-delĂ des idĂ©es reçues entourant ces questions dâinĂ©galitĂ©s. Par exemple, contrairement Ă une vision oĂč lâalimentation durable serait lâapanage de publics aisĂ©s et diplĂŽmĂ©s, on observe que les publics modestes expriment un intĂ©rĂȘt pour une alimentation saine, de qualitĂ© et durable et ne sont pas absents des tendances de consommation, comme celle du bio. Lâenjeu crucial se situe donc davantage dans le besoin dâinclusion et de cohĂ©sion dans la façon de concevoir, prĂ©senter et mener le projet de transition, ce qui peut prendre des formes trĂšs concrĂštes notamment au niveau local voir par exemple le projet Territoires Ă vivres » . Enfin, encore une fois, il faut faire attention au deux poids, deux mesures » personne, par exemple, ne sâest alarmĂ© du potentiel surcoĂ»t impliquĂ© pour les mĂ©nages modestes par le dĂ©veloppement rapide de la 5G, alors que la tĂ©lĂ©phonie mobile est aujourdâhui un prĂ©requis pour ĂȘtre inclus dans la vie sociale, Ă©conomique, professionnelle pour tout un chacun, y compris pour les plus contraints financiĂšrement. Câest parce que nous sommes habituĂ©s Ă cette course Ă lâinnovation, parce que les changements de nos modes de vie liĂ©s au numĂ©rique ont Ă©tĂ© incitĂ©s et dĂ©ployĂ©s par une multitude dâactions des acteurs publics et privĂ©s voir La numĂ©risation du monde, F. Flipo, 2021 que cette dynamique du numĂ©rique ne pose pas de problĂšmes dâinĂ©galitĂ©s sont cruciaux et de nombreux travaux cherchent Ă les rĂ©soudre dans le cadre de la transition, cette question ne peut se rĂ©sumer Ă lâidĂ©e dâune âĂ©cologie punitiveâ, clivage que les français sont prĂȘts Ă Cela menace nos libertĂ©sLes mesures Ă©cologistes vont restreindre nos capacitĂ©s Ă consommer, Ă nous dĂ©placer. Ce sont des intrusions inacceptables dans notre vie privĂ©e. On retrouve ici les termes de Khmer verts, de dictature Ă©cologiqueâŠâ RĂ©ponses possibles âLibres⊠dans un cadre trĂšs contraintCommençons par un paradoxe tout le monde est libre mais tout le monde fait la mĂȘme chose ! ». Dit autrement, nos vies sont largement rĂ©gies par des cadres qui organisent et structurent fortement nos vies infrastructures, offres de produits et de services, organisation du temps, normes sociales et imaginaires, rĂ©glementations⊠Câest dâailleurs ce qui explique quâil y a une importante rĂ©gularitĂ© de nos modes de vie on parle ainsi de mode de vie occidental, français ou pĂ©riurbain par exemple. Cela ne veut pas dire que chacun ne trouve pas un peu de marge de manĆuvre pour dĂ©velopper son propre style de vie, mais cela se traduit dans un cadre partagĂ© prĂ©pondĂ©rant, qui relativise lâidĂ©e dâune totale libertĂ© de nos modes de plus, la libertĂ© considĂ©rĂ©e dans ces discours est avant tout celle de consommer, or ce nâest quâune de nos libertĂ©s. Ăvidemment les dĂ©bats soulevĂ©s par la crise sanitaire et les mesures impactant nos libertĂ©s, comme ceux concernant la libertĂ© de la presse dans un contexte de concentration Ă©conomique ce qui a motivĂ© une commission dâenquĂȘte du SĂ©nat, plaident pour avoir une vue dâensemble sur la prĂ©servation de nos libertĂ©s. Pensons notamment au travail de François Sureau sur nos libertĂ©s publiques. Voir ici lâensemble des dessins reprĂ©sentant les 12 discours de lâinaction climatiquePar ailleurs, notre libertĂ© de consommer elle-mĂȘme est bridĂ©e par lâoffre existante aujourdâhui personne nâest libre dâacheter une voiture low cost sans Ă©lectronique, elle nâest tout simplement pas produite ; on ne peut pas non plus se passer des outils numĂ©riques ; et faire rĂ©parer les objets de son quotidien nâest pas toujours possible. Elle est aussi orientĂ©e par la publicitĂ©, qui nous enferme dans des stĂ©rĂ©otypes et des reprĂ©sentations datĂ©es et nous dĂ©peint un imaginaire que nous ne sommes en moyenne pas en capacitĂ© dâacheter. Quâil sâagisse du marronnier des âsports dâhiverâ, largement couverts par les journaux tĂ©lĂ©visĂ©s alors mĂȘme que seuls 10% de la population les pratiquent, de lâidĂ©al de la maison individuelle ou de lâachat dâune voiture neuve⊠Quelles sont les marges de manĆuvre et les libertĂ©s des Françaises et Français, et notamment ceux ayant des revenus modestes, pour se conformer aux reprĂ©sentations vĂ©hiculĂ©es dans la publicitĂ© et les mĂ©dias ? Changer ces reprĂ©sentations de maniĂšre cohĂ©rente avec les crises environnementales est un enjeu essentiel et cette Ă©volution nâimplique pas forcĂ©ment une perte de libertĂ© voir par exemple le rĂ©cent rapport EPE. Et rappelons que la publicitĂ© dispose de moyens trĂšs importants, bien supĂ©rieurs Ă ceux des politiques publiques dont on questionne pourtant lâaspect liberticide. En 2014 par exemple, le budget de communication publique sur la nutrition et la santĂ© sâĂ©levait Ă 4 millions dâeuros quand lâinvestissement du secteur de lâalimentation dans les mĂ©dias atteignait 2,4 milliards dâeuros, qui plus est fortement orientĂ©s vers la publicitĂ© des aliments pauvres, nutritivement dĂ©conseillĂ©s par ce programme. Dans le secteur automobile, au niveau mondial, câest plus de 35 Md$ qui sont dĂ©pensĂ©s en publicitĂ©, dont 5 Md$ au total pour la France, lâAllemagne et la le dire de maniĂšre directe aujourdâhui personne nâest libre dâavoir une vie sobre car appartenir Ă la sociĂ©tĂ© nĂ©cessite la consommation de certains biens et services indispensables communiquer, se dĂ©placer⊠et car lâorganisation qui produit ces biens et services nâest pas nos histoires collectivesLâĂ©volution de nos normes sociales relativise Ă©galement en partie ce questionnement sur notre libertĂ© de dĂ©sirer et de choisir. Les normes sociales actuelles, fruits de lâhistoire et de conventions, sont autant un ciment de notre vie collective que des contraintes sur nos pratiques quotidiennes ex. âun bon repas de famille doit inclure de la viandeâ ; âune personne respectable ne se dĂ©place pas en vĂ©loâ. On peut de ce fait voir la transition vers de nouveaux modes de vie comme une redĂ©finition collective de ce qui est dĂ©sirable et positif[2], chose que lâhumanitĂ© fait en permanence, de maniĂšre plus ou moins explicite. Comme Y. N. Harari lâexplique, le propre de lâhumanitĂ© est de croire collectivement dans les histoires quâelle se raconte, et ces histoires le fait de concĂ©der, Ă lâEtat et Ă nos concitoyens, une part de nos libertĂ©s dans le cadre dâun contrat social est le ciment de nos vies collectives. Câest dâailleurs un des rĂ©sultats de lâenquĂȘte ADEME sur les modes de vie menĂ©e dans la prospective âTransitions 2050â les citoyens interrogĂ©s perçoivent bien lâenjeu de la rĂ©duction de la libertĂ© de consommer. Mais, pour eux, la consommation nâest pas la pratique cardinale derriĂšre lâidĂ©e de libertĂ©. In fine, ce qui compte le plus Ă leurs yeux relĂšve de lâorganisation de la vie sociale, tout particuliĂšrement de la prise en charge des inĂ©galitĂ©s et de la capacitĂ© Ă influer sur son futur ou celui de son territoire. La transition Ă©cologique rĂ©actualise le besoin de se poser ces questions que sommes-nous prĂȘts Ă donner et Ă recevoir, en termes de droits et de devoirs, dans le cadre dâun nouveau contrat social nous permettant de rester dans les limites de la planĂšte ? Et que deviendraient nos libertĂ©s dans un monde frappĂ© par un lourd changement climatique ?4. La puissance publique nâest pas lĂ©gitime pour agir sur nos modes de vieSelon cet argument, la puissance publique sortirait de son rĂŽle en cherchant Ă transformer nos modes de vie pour la transition. Cela irait Ă lâencontre de lâidĂ©e dâun individu libre et responsable. Dans un contexte Ă©conomique mondialisĂ©, marquĂ© par des discours sur la rĂ©gulation par le marchĂ© lui-mĂȘme, lâaction de la puissance publique Ă©tatique serait Ă©galement inadaptĂ©e. â RĂ©ponses possibles âUn rĂŽle lĂ©gitime de chef dâorchestre de la vie collectiveCet argument peut constituer un obstacle ou une excuse Ă lâinaction pour les dĂ©cideurs politiques. Prenons lâexemple de lâagriculture Ă©tant donnĂ© que la puissance publique nâest pas lĂ©gitime pour agir sur la demande de viande ou nâen est pas capable, une politique de rĂ©duction de la production de viande ne serait pas souhaitable car elle conduirait Ă renforcer des importations moins disantes sur le plan environnemental la demande restant fixe. Cet argument, qui dĂ©lĂ©gitime lâaction sur la demande, devient bloquant pour mettre en Ćuvre lâĂ©volution de lâ la section prĂ©cĂ©dente âCela menace nos libertĂ©sâ, nous expliquions que les cadres collectifs sont prĂ©pondĂ©rants pour organiser nos modes de vie. La puissance publique, et en particulier lâĂtat, nâest pas le seul acteur Ă agir sur ce cadre de rĂ©fĂ©rence, qui est mĂ» par lâensemble des acteurs de la vie sociale entreprises, mĂ©dias â sociaux ou non â, mouvements citoyens, artistes, acteurs financiers, etc. Mais elle y joue un rĂŽle particulier, celui de chef dâorchestre, en tant que garante de lâintĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral et du vivre ensemble ». Ainsi, une politique publique par dĂ©finition vient encadrer les pratiques ou les modes de vie afin de permettre Ă un groupe dâindividus de vivre la puissance publique est lĂ©gitime Ă agir sur les modes de vie, la question de son pĂ©rimĂštre dâintervention est un objet constant de dĂ©bat dans les sociĂ©tĂ©s dĂ©mocratiques, et ne doit pas ĂȘtre interrogĂ©e de façon hors sol », mais contextualisĂ©e ce quâon va considĂ©rer comme Ă©tant une action publique lĂ©gitime dĂ©pend des convictions et des valeurs de chaque citoyen, mais aussi des principes au nom desquels lâĂtat justifie son intervention dans tel ou tel champ et des modalitĂ©s dâaction quelles politiques publiques sont mises en Ćuvre. DĂ©battre des façons dâagirCe sont donc autant les fins que les moyens qui peuvent ĂȘtre objets de discussion. Le tableau ci-dessous rĂ©pertorie 8 philosophies pour agir sur les modes de vie, auxquelles sont associĂ©es une diversitĂ© de parti pris idĂ©ologiques, qui se traduiront ensuite dans les politiques mises en Ćuvre. Cela nous semble ĂȘtre une base utile pour dĂ©battre dĂ©mocratiquement des moyens de mise en Ćuvre de la transition. Par exemple, pour un mĂȘme enjeu par ex. la mobilitĂ©, les citoyens pourraient considĂ©rer quâagir par la taxe carbone est moins acceptable quâagir par la rĂ©glementation. Le dĂ©bat dĂ©mocratique, comme lâa illustrĂ© la Convention Citoyenne pour le Climat, est alors utile pour identifier les moyens dâactions qui paraissent lĂ©gitimes et dans les exemples historiquesUn retour historique est Ă©galement utile pour battre en brĂšche cette idĂ©e F. Trentmann dans sa magistrale histoire de la consommation montre que lâhistoire regorge dâexemples dâintervention de lâEtat sur nos modes de consommation, que ce soit dans lâalimentation, nos pratiques dâĂ©pargne ex. incitation trĂšs forte Ă lâĂ©pargne au Japon pendant le dĂ©veloppement post 2Ăšme guerre mondiale, notre mobilité⊠Aux Ătats-Unis par exemple, aprĂšs la Seconde Guerre mondiale, lâĂtat doit Ă©couler les surplus de son agriculture ; il dĂ©veloppe alors lâidĂ©e dâun bon repas pour tous les enfants, en tant que service public dĂ©livrĂ© Ă lâĂ©cole, et affecte ainsi directement des millions dâ de Nixon au pouvoir sonne la fin de ce dispositif la mesure est transformĂ©e en une seule aide aux plus pauvres, puis privatisĂ©e ; on sâĂ©loigne alors de lâidĂ©e dâun repas sain, et les fruits et lĂ©gumes sont progressivement remplacĂ©s par produits plus gras, plus sucrĂ©s, prĂ©parant ainsi des gĂ©nĂ©rations de consommateurs Ă ces pratiques alimentaires. Pour lâhistorien, lâĂtat ne peut tout simplement pas dire je ne peux rien faire, le consommateur est souverain ».5. Il faut sauvegarder nos modes de vie actuelsCe discours renvoie Ă lâidĂ©e selon laquelle nos modes de vie actuels seraient les plus progressistes et dĂ©veloppĂ©s qui soient. Il renvoie largement Ă une reprĂ©sentation qui perçoit le dĂ©veloppement de notre sociĂ©tĂ© comme une trajectoire linĂ©aire, Ă©vidente, oĂč dĂ©veloppement Ă©conomique et social sont intimement liĂ©s au progrĂšs technique. Ainsi on va retrouver dans certains scĂ©narios lâidĂ©e que le fort dĂ©veloppement des solutions technologiques pour atteindre la neutralitĂ© carbone permettra de sauvegarder les modes de vie du dĂ©but du XXIĂšme siĂšcle. Cet argument repose implicitement sur lâidĂ©e que nous serions Ă une sorte dâĂąge dâor de nos modes de vie, et quâils mĂ©riteraient donc dâĂȘtre prĂ©servĂ©s.â RĂ©ponses possibles âSerions-nous Ă un Ăąge dâor des modes de vie ? Chacun, selon sa gĂ©nĂ©ration, a sa propre nostalgie dâune Ă©poque et dâun mode de vie en particulier, ce qui nâempĂȘche pas que les modes de vie Ă©voluent en permanence. LâĂ©volution rĂ©cente la plus marquante est Ă©videmment la place que le numĂ©rique a pris dans notre vie quotidienne et dans lâorganisation de la sociĂ©tĂ©. Communiquer, sâinformer, se divertir, consommer, sâĂ©duquer⊠ont Ă©voluĂ© sur un laps de temps court. Aurions-nous dĂ» sauvegarder nos modes de vie dâavant le numĂ©rique ?Le fait de figer ainsi la sociĂ©tĂ© dans ses modes de vie actuels conduit Ă tout faire reposer sur les changements technologiques et la transformation de lâĂ©conomie pour atteindre la neutralitĂ© carbone. Ce raisonnement ignore donc le fait, bien Ă©tabli notamment par la sociologie des techniques, que lâĂ©volution des technologies conduit inĂ©vitablement Ă des changements de mode de vie la technique et le social Ă©tant interdĂ©pendants, ce sont des coĂ©volutions. Pensons Ă la façon dont 70 ans de dĂ©veloppement automobile ont façonnĂ© nos territoires, notre rapport Ă lâespace ex. je vis dans un espace pĂ©riurbain Ă©tendu connectĂ© par les infrastructures automobiles et au temps ex. âcâest Ă combien de tempsâ, sous-entendu âen voitureâ.Cela est aussi vrai avec lâĂ©volution de nos systĂšmes Ă©conomiques nouveaux emplois, organisation du travail, place de lâĂtat et du marché⊠par exemple, la rĂ©volution industrielle a conduit Ă lâĂ©mergence dâune population ouvriĂšre nombreuse dans les villes, la transformation progressive du monde agricole chute du nombre de paysan, concentration des parcelles et une Ă©volution forte des paysages remembrement.Sur la pĂ©riode 1980-2000, la mondialisation et la numĂ©risation de lâĂ©conomie ont entraĂźnĂ© une tertiarisation de lâĂ©conomie française et une polarisation du marchĂ© du travail multiplication des formes dâemplois, une mĂ©tropolisation du territoire français et des pratiques de dĂ©placement accentuĂ©es dans les modes de vie valorisĂ©s avion, tgv, voyage dans une capitale europĂ©enne sur le week-endâŠ.6. Nos modes de vie ne peuvent pas changerA ce discours de sauvegarde de nos modes de vie actuels peut sâajouter celui qui veut que changer nos modes de vie est idĂ©aliste, voire tout bonnement impossible » cet argument joue sur un implicite frĂ©quent, lâimpression de fixitĂ© de nos modes de vie. â RĂ©ponses possibles âPourtant lâhistoire rĂ©cente regorge de changements de modes de vie, prenons simplement quelques exemples. Certains de ces changements sont le fait de dĂ©cisions politiques Une circulaire du 8 aoĂ»t 1956, signĂ©e du ministre de lâEducation nationale, relative aux boissons de table servies dans les internats et cantines scolaires», interdit la distribution dâalcool Ă la cantine pour les enfants, une pratique jusquâalors assez frĂ©quente. A la place, la consommation quotidienne de lait est expĂ©rimentĂ©e pour ses vertus nutritionnelles. Quand on connaĂźt, aujourdâhui, lâimportance de lâenfance et de lâĂ©ducation dans la formation des habitudes alimentaires, ce type de mesure a inĂ©vitablement eu des effets de long loi du 13 juillet 1965 les femmes mariĂ©es peuvent occuper un emploi sans lâautorisation de leur Ă©poux et ouvrir un compte en banque en leur nom propre. Cela aura des implications majeures sur la fĂ©minisation de lâemploi[3], et in fine sur les modes de changements sont liĂ©s Ă de nouvelles offres, qui rentrent dans nos pratiques de consommationLe dĂ©ploiement du smartphone, comme illustrĂ© par les courbes ci-dessous, modifiera profondĂ©ment et rapidement nos façons de communiquer, de nous informer, de champ de lâalimentation verra aussi les pratiques Ă©voluer au fur et Ă mesure de la commercialisation de nouveaux produits et de changement dans les rythmes quotidiens la consommation de plats prĂ©parĂ©s a par exemple Ă©tĂ© multipliĂ© par 3 en 30 ans[4] dĂ©notant un changement dans notre rapport Ă la prĂ©paration des repas et Ă la changements sont plus systĂ©miques et sont la rĂ©sultante de nombreux autres changements dans la 1980 et 2008, les distances quotidiennes parcourues par les Français ont Ă©tĂ© multipliĂ©es par 1,5[5]. Et la taille de nos grandes aires urbaines par entre 2000 et 2010[6]. Câest donc le cadre territorial et temporel concret des modes de vie quotidiens qui a fortement Ă©voluĂ© lors de ces derniĂšres dĂ©cennies. Ces illustrations visent simplement Ă montrer la diversitĂ© des changements qui sâexercent en permanence sur nos modes de vie, pour une diversitĂ© de raisons et dans une diversitĂ© de directions. Bien dâautres encore pourraient ĂȘtre mobilisĂ©es. Cela nâest pas une preuve que nos modes de vie peuvent Ă©voluer assez vite pour faire face aux crises environnementales, mais câest le signe que des rĂ©inventions sont toujours en cours et que la transition peut sâappuyer sur ces on sait que les changements sociaux ne sont pas totalement linĂ©aires il existe des points de bascule voir lâarticle Bon Pote qui peuvent accĂ©lĂ©rer les changements, comme rappelĂ© par le rĂ©cent rapport du GIEC[7]. Par exemple, une fois que la population possĂšde une certaine proportion de smartphone, des effets de rĂ©seaux[8] font que son usage est de plus en plus facile, utile, nĂ©cessaire ce qui va pousser la suite de son La sobriĂ©tĂ© est un choix avant tout âidĂ©ologiqueâCet argument vise Ă discrĂ©diter une approche par la sobriĂ©tĂ© en la prĂ©sentant comme idĂ©ologique associĂ©e Ă des valeurs subjectives et non scientifique lĂ oĂč une approche perçue comme scientifique est issue dâun raisonnement rationnel basĂ© sur des faits. Une illustration est la critique des travaux de lâassociation nĂ©gaWatt leur hypothĂšse de sobriĂ©tĂ© proviendrait de leur opposition âidĂ©ologiqueâ au nuclĂ©aire. Ainsi, dans une situation oĂč lâon produirait moins dâĂ©lectricitĂ©, on serait obligĂ© de se serrer la ceinture » sur nos modes de vie.â RĂ©ponses possibles âUn concept ancienâŠCe concept de sobriĂ©tĂ© a des racines anciennes, pouvant ĂȘtre spirituelles, religieuses et philosophiques et a connu une forme de renouveau dans la sociĂ©tĂ© moderne du fait des interrogations sur les impacts de la croissance Ă©conomique Cezard et Mourad, 2019 ; Guillard et Ben Kemoun, 2019. Il renvoie aux idĂ©es de tempĂ©rance, de modĂ©ration, de frugalitĂ©, comme sources de bonheur et dâĂ©mancipation. Quand il sâagit de penser la transition Ă©cologique, il est important dâavoir en tĂȘte que la sobriĂ©tĂ© concerne lâensemble des systĂšmes, des filiĂšres et des organisations et non pas uniquement lâindividu en bout de chaĂźne. Cette acception restrictive de la sobriĂ©tĂ© se rĂ©vĂšle inefficace lâindividu se retrouve alors chargĂ© de mettre en Ćuvre une logique de sobriĂ©tĂ© orthogonale au reste de la sociĂ©tĂ© fondĂ© sur lâabondance comme nous lâavons montrĂ© plus haut imaginaire de la publicitĂ©, organisation des chaines de valeur peu adaptĂ©e Ă lâĂ©mergence dâoffre sobre, modes de production et de recyclage, etc.. En termes concrets, on peut dĂ©finir la sobriĂ©tĂ© Ă©nergĂ©tique comme le fait de rĂ©duire les besoins en Ă©nergie en changeant les pratiques ou les habitudes, en changeant la façon de rendre le service Ă tous les niveaux de la sociĂ©tĂ©. La sobriĂ©tĂ© consiste Ă interroger le besoin ex. combien de m2 de logement par habitant ou de taille de voiture ou de changer la façon de rendre le mĂȘme service ex. augmenter la part de protĂ©ines vĂ©gĂ©tales, changer le mode de transport. LâidĂ©e est, dans la mesure du possible, de chercher Ă rĂ©duire Ă la source le besoin de mobiliser des ressources ou des Ă©quipements techniques. Cette Ă©tape amont est complĂ©mentaire des efforts dâefficacitĂ© Ă©nergĂ©tique, qui cherche elle Ă amĂ©liorer la capacitĂ© des Ă©quipements techniques Ă rendre leur service tout en minimisant leur consommation dâĂ©nergie ex. un moteur de voiture moins consommateur de carburant pour une mĂȘme puissance.âŠde plus en plus mis en avant par la communautĂ© scientifiqueLes analyses scientifiques globales pointent de plus en plus le besoin de sobriĂ©tĂ© le rapport du GIEC soulignait dĂ©jĂ quâagir pour une low demand », en complĂ©ment de lâefficacitĂ© facilitait lâatteinte des objectifs climatiques et lâindĂ©pendance Ă des technologies incertaines de captation du carbone. Et de plus en plus de travaux de prospective cherchent Ă intĂ©grer les changements de modes de UNEP Gap Report de 2020 soulignait Ă©galement ce besoin dâaller vers des modes de vie plus sobres. Le rĂ©cent rapport du GIEC renforce encore ce constat en mettant en avant lâimpact global dâattĂ©nuation que pourraient avoir les actions sur la demande[9].Cette thĂ©matique prend une place croissante dans la recherche le rĂ©seau Enough regroupe les scientifiques europĂ©ens qui travaillent sur ces questions et recense une littĂ©rature de plus en plus abondante sur le sujet, avec notamment beaucoup de travaux rĂ©cents cherchant Ă identifier les conditions dâune bonne vie » la prĂ©servation de lâensemble des bĂ©nĂ©fices sociaux clĂ©s dans les limites de la planĂšte. La sobriĂ©tĂ© fait partie des options privilĂ©giĂ©es pour une raison principale la multiplicitĂ© des crises environnementales climat, biodiversitĂ©, ressources⊠telle que reprĂ©sentĂ©es par le cadre des limites planĂ©taires combinĂ©e Ă la lenteur des progrĂšs actuels fait que lâampleur des changements Ă mettre en Ćuvre est de plus en plus grande et exigeante, nĂ©cessitant de considĂ©rer tous les leviers possibles. Cette figure issue du rĂ©sumĂ© pour dĂ©cideur du rĂ©cent rapport du GIEC dĂ©crit les actions possibles sur la demande, incluant donc des leviers de sobriĂ©tĂ©, et leurs potentielsLa notion de sobriĂ©tĂ© recouvre deux faces, qui ne sont pas contradictoires mais au contraire complĂ©mentaires. Dâune part, ce qui est de lâordre de lâidĂ©ologie, plongeant dans nos racines religieuses et philosophiques, dont lâencyclique Laudato Si est un bon exemple rĂ©cent. Cette approche ne devrait pas ĂȘtre perçue comme un refus du progrĂšs technique mais comme une invitation Ă sâinterroger sur les sources du bien-ĂȘtre humain et de lâĂ©mancipation. Dâautre part, ce qui est de lâordre scientifique et rationnel. Dans cette derniĂšre perspective, il est nĂ©cessaire de rechercher toutes les solutions nĂ©cessaires pour limiter les crises environnementales, la sobriĂ©tĂ© faisant partie de cet Ă©ventail de solutions. Quelques soient les solutions technologiques mobilisĂ©es pour produire de lâĂ©nergie ou se dĂ©placer par exemple, rĂ©duire la demande amont est une stratĂ©gie pertinente pour rĂ©duire les impacts lâidĂ©e derriĂšre la sobriĂ©tĂ© nâest pas aussi marquĂ©e idĂ©ologiquement que certains le prĂ©sentent un article scientifique de psychologie montre quâun discours climatique orientĂ© sur la rĂ©duction du gaspillage fonctionne avec les publics conservateurs et rĂ©sonne avec leurs valeurs. Voyons la sobriĂ©tĂ© comme une politique anti-gaspillage gĂ©nĂ©ralisĂ©e !8. La responsabilitĂ© individuelle devrait ĂȘtre mise en avant Cet argument met en avant la responsabilitĂ© individuelle des consommateurs pour rĂ©orienter leurs comportements et ainsi lâensemble de lâĂ©conomie. Si ces changements sâavĂšrent impossibles, câest Ă cause des contradictions et incohĂ©rences des individus dâun cĂŽtĂ© des sondages et baromĂštres rĂ©vĂšlent leurs prĂ©occupations et leurs aspirations Ă des modes de vie et de consommation plus durables ; mais de lâautre les actes ne suivent pas dans les choix de mobilitĂ©, dâalimentation ou de consommation durable. Cet Ă©tat de fait peut constituer une forme dâexcuse Ă lâinaction pour les dĂ©cideurs publics et privĂ©s, qui se disent incapables dâagir dans ce contexte.â RĂ©ponses possibles âLes baromĂštres successifs menĂ©s par lâAdeme le montrent, les Français sont conscients de la nĂ©cessitĂ© de changements de modes de vie et prĂȘts Ă cela. Dâautres sondages, menĂ©s au niveau international, identifient Ă©galement la volontĂ© dâune partie significative[10] de la population Ă mettre en Ćuvre des changements. Toutefois ces dĂ©clarations dâintention ne se retrouvent pas forcĂ©ment dans les actes. Comme lâobservaient les auteurs dâune Ă©tude du Behavioural Insight Team âtwo-thirds of people want to consume less, and consume more sustainably, and yet most fail to act on this expressed preferenceâ. Certains scientifiques interprĂštent ce dĂ©calage comme un value-action-gapâ et explorent les mĂ©canismes psychologiques individuels associĂ©s. Leurs rĂ©sultats indiquent que la communication Ă lâĂ©gard du public, afin de renforcer la prise de conscience sur les changements liĂ©s Ă la transition, a des limites, car lâintention ne dĂ©clenche pas forcĂ©ment lâaction. Lamb et al. 2020 dĂ©cryptent les risques politiques de ce discours sur lâindividualisme qui rĂ©oriente lâaction climatique des solutions systĂ©miques vers des actions individuelles, comme rĂ©nover sa maison ou conduire une voiture plus efficace ». Pour ces auteurs, le problĂšme est que ce discours rĂ©duit lâespace de solution aux choix de consommation personnels, en occultant le rĂŽle des acteurs et organisations puissants qui façonnent ces choix et gĂ©nĂšrent des Ă©missions de combustibles fossiles ». En orientant les responsabilitĂ©s vers les seuls individus, ce discours risque ainsi de retarder lâaction. Et ce dâautant plus que lâanalyse par la responsabilitĂ© individuelle a des limites et peut avoir des consĂ©quences politiques nĂ©fastes. Les sciences humaines et sociales expliquent bien comment nos modes de vie et de consommation sont dĂ©pendants de schĂ©mas collectifs mes choix dâalimentation ou de mobilitĂ© sont dĂ©pendants des normes sociales de mon groupe qui est ce qui dĂ©sirable, valorisĂ© socialement autour de moi et Ă©galement de lâoffre concrĂšte qui mâest accessible quotidiennement ; mon imaginaire de consommation basĂ© sur lâabondance est nourri par la publicitĂ© et plus largement par lâidĂ©al de progrĂšs au centre de nos sociĂ©tĂ©s. Cet Ă©cart nâest pas irrationnel et ne relĂšve en aucun cas uniquement de biais de raisonnement infrastructure, acteurs privĂ©s et institutionnels qui montrent lâexemple, normes socialesâŠDes actions collectives sont nĂ©cessaires pour combler cet Ă©cart, et le rĂ©cent rapport du GIEC rappelle la responsabilitĂ© des entreprises et des pouvoirs publics dans la mise en Ćuvre des infrastructures indispensables Chapitre 5, WG III. Par ailleurs, les individus ne sont pas que des consommateurs, ce sont des citoyens en attente de solution Ă©quitable et de partage juste des efforts câest ce qui ressort en condition n°1 de changement de mode de vie du baromĂštre Ademe. Câest aussi le travail des 150 citoyens de la Convention Citoyenne qui a justement consistĂ© Ă dĂ©crire un ensemble de politiques publiques, agissant Ă tous les niveaux, permettant de mener une action ambitieuse et acceptable. 9. Cela nous mĂšnera vers la dĂ©croissance et câest la fin de la prospĂ©ritĂ©Cet argument consiste Ă dire que mĂȘme si les changements de modes de vie vers la sobriĂ©tĂ© Ă©taient possibles, ils ne seraient pas souhaitables, voire dangereux, du fait de lâimpact nĂ©gatif sur la croissance Ă©conomique et donc sur notre prospĂ©ritĂ©. Moins consommer et moins produire, câest automatiquement moins de ressources Ă©conomiques pour financer nos systĂšmes sociaux et notre prospĂ©ritĂ©. On trouve le reflet de cet argument dans les injonctions contradictoires que reçoivent les individus. Par exemple, Ă lâĂ©loge de la sobriĂ©tĂ© lors du 1er confinement a succĂ©dĂ© dĂšs la rentrĂ©e un appel Ă consommer lâĂ©pargne mise de cĂŽtĂ© pour relancer lâĂ©conomie, car celle-ci repose en effet en partie sur la consommation des mĂ©nages. Câest bien en pensant conjointement les changements de modes de vie et les cadres politiques et Ă©conomiques de nos sociĂ©tĂ©s que lâon peut rĂ©ellement mener la transition. â RĂ©ponses possibles âCette controverse est majeure et Ă©videmment trĂšs vaste et il nâest pas question de tenter de la trancher ici mais essayons de montrer Ă minima que cela ne devrait pas ĂȘtre un Ă©lĂ©ment bloquant Ă la mise en place de la transition des modes de de quoi ? ProspĂ©ritĂ© pour qui ? La premiĂšre question concerne Ă©videmment la nature de ce qui doit dĂ©croitre et les implications sur la prospĂ©ritĂ©. Depuis lâimportant ouvrage de T. Jackson, ProspĂ©ritĂ© sans croissance », de nombreux travaux scientifiques ont explorĂ© la possibilitĂ© de rĂ©duire la consommation de ressources matĂ©rielles et Ă©nergĂ©tiques tout en conservant de bonnes conditions de vie et de bien-ĂȘtre. Deux principes expliquent cette possibilitĂ© 1 au-delĂ dâun certain seuil, la consommation nâapporte plus ou peu de bien-ĂȘtre supplĂ©mentaire et câest notamment le cas dans les pays dĂ©veloppĂ©s idĂ©e de rendement dĂ©croissant ou de saturation du besoin ; 2 ce qui apporte du bien-ĂȘtre ce sont les services rendus un service de mobilitĂ©, un service dâalimentation et non les ressources directement, or il est possible de rendre les mĂȘmes services avec plus de sobriĂ©tĂ© et dâefficacitĂ© et donc moins de ressources naturelles prĂ©levĂ©es. Le rĂ©cent rapport du Giec, en sâappuyant sur tous ces travaux scientifiques, estime donc que les actions sur la demande et donc nos modes de vie et de consommation sont cohĂ©rentes avec le fait dâamĂ©liorer le bien-ĂȘtre de base pour tous âDemand side mitigation response options are consistent with improving basic wellbeing for all.high confidenceâ SPM Ce rapport indique Ă©galement que les politiques de sobriĂ©tĂ© sont un ensemble de mesures et de pratiques quotidiennes qui permettent dâĂ©viter de la demande pour lâĂ©nergie, les matĂ©riaux, le sol et lâeau tout en dĂ©livrant du bien-ĂȘtre humain pour tous dans les limites de la planĂšte. Il semble donc exister un espace des possibles combinant dĂ©croissance de la consommation dâĂ©nergie et de ressources naturelles et prospĂ©ritĂ©, quâil reste Ă©videmment Ă explorer et Ă la croissance Ă©conomique alors ? Rappelons que le PIB, sâil est la boussole de nos politiques, nâest pas lâindicateur le plus adĂ©quat pour comprendre la rĂ©partition des richesses, le dĂ©veloppement ou le bien-ĂȘtre humain. Il sâagit lĂ dâun consensus bien Ă©tabli dans les sciences humaines et sociales. Cela implique dâune part de se prĂ©occuper davantage du contenu rĂ©el de la croissance Ă©conomique, comme la rĂ©cente analyse des scĂ©narios Transitions 2050 de lâADEME le souligne. Dâautre part, de plus en plus de travaux sâintĂ©ressent au bien-ĂȘtre ou Ă dâautres indicateurs alternatifs de prospĂ©ritĂ© dans leurs analyses des limites planĂ©taires voir par exemple la âdoughnut economyâ de K. Raworth. Dans le mĂȘme temps, cela nâĂ©vacue pas totalement la question de la croissance Ă©conomique car comme le notait avec malice T. Jackson 2017 âin an economy that is founded on growth, growth is essential for stabilityâ mĂȘme si elle nâest pas lâalpha et lâomega de notre prospĂ©ritĂ©, la croissance Ă©conomique est un pilier des sociĂ©tĂ©s que nous avons construit autour dâelle. Cela conduit ainsi Ă la question de la capacitĂ© des pays dĂ©veloppĂ©s Ă dĂ©coupler », câest-Ă -dire Ă concilier une baisse forte de leurs Ă©missions et consommations de ressources naturelles avec une croissance de leur activitĂ© Ă©conomique mesurĂ©e par le PIB. Aujourdâhui il est trĂšs incertain quâun dĂ©couplage Ă un rythme suffisant pour rester dans les limites de la planĂšte soit suffisant, ce qui questionne le narratif de la croissance verte » voir lâanalyse dĂ©taillĂ©e des conclusions du GIEC de T. Parrique. Dans le mĂȘme temps, de nombreux acteurs travaillent pour identifier comment obtenir les fruits de la croissance Ă©conomique stabilitĂ© sociale, rĂ©silience sociale, emploi sans que la croissance en tant que telle continue dâĂȘtre une boussole de lâaction publique voir ce rĂ©cit de Zoe Institute.Que faire ? Accepter les incertitudes sur le futur de la croissance Ă©conomique et agir dĂšs aujourdâhui. Il est important dâavoir en tĂȘte quâindĂ©pendamment des changements pour faire face Ă la crise environnementale, il y a des incertitudes sur la croissance Ă©conomique future et il faut de toute façon nous y prĂ©parer, notamment pour prĂ©server notre systĂšme social. Cela passe par davantage dâarbitrages politiques dans le partage des fruits de notre activitĂ© Ă©conomique. LâĂ©change entre S. Hallegate et J. Hickel, le premier un tenant de la croissance verte et le second un dĂ©fenseur de la dĂ©croissance entendue comme âa planned reduction of aggregate resource and energy use in high-income nations designed to bring the economy back into balance with the living world in a safe, just and equitable wayâ, est Ă©galement riche dâenseignements sur les diffĂ©rentes positions dans ce dĂ©bat et permet de montrer les points de dĂ©saccords mais aussi les points dâaccords sur lesquels sâappuyer pour agir dĂšs Ă prĂ©sent pour mener la transition, sans devoir attendre dâavoir totalement tranchĂ© ces dĂ©bats en partie thĂ©oriques. La rĂ©flexion par secteur peut aussi ĂȘtre trĂšs utile pour comprendre comment les choses peuvent Ă©voluer. Par exemple, dans le domaine de lâagriculture et de lâalimentation, la dĂ©croissance en quantitĂ© nâimplique pas forcĂ©ment une baisse en valeur globale la logique moins mais mieux » cherche par exemple Ă mettre en avant lâidĂ©e de consommer moins de viande mais mieux produite et donc plus Les solutions technologiques vont rĂ©soudre les crises environnementales Cet argument consiste tout simplement Ă Ă©carter le besoin de faire Ă©voluer nos modes de vie sur la base dâun optimisme technologique ». Cette idĂ©e reçue a trois variations, quâil est important dâidentifier celle qui voudrait que les enjeux Ă©nergĂ©tiques et environnementaux soient uniquement des sujets techniques, ce qui implique quâils nâauraient pas Ă ĂȘtre dĂ©battus collectivement ; celle qui survalorise la place de la technique comme levier pour rĂ©soudre les dĂ©fis Ă©cologiques considĂ©rant quâil est inutile, voire idĂ©ologique de questionner les transformations de nos modes de vie actuels ; celle qui sous-entend que lâinnovation technique est forcĂ©ment consensuelle, bĂ©nĂ©fique, et ne soulĂšve pas de controverses, a lâinverse dâautres leviers de transition de la sociĂ©tĂ©.â RĂ©ponses possibles âUn changement technique ne va pas sans changement social ! Câest un biais trĂšs courant de penser que lâun et lâautre sont sĂ©parĂ©s, mais il nâexiste pas de changement technique sans changement social. De nombreux travaux en sciences humaines et sociales ont dĂ©crit comment changements techniques et changements sociaux allaient de pair. Une chercheuse comme E. Shove a par exemple traitĂ© de ces liens de dĂ©pendances dans de nombreux travaux et sur de nombreux domaines. Prenons simplement lâexemple de lâautomobile le dĂ©veloppement technique des vĂ©hicules et des infrastructures est allĂ© de pair Ă des changements dans les territoires de vie accessibilitĂ© de zone pĂ©riurbaines et lâamĂ©nagement de nos villes, la façon de consommer dĂ©veloppement des centres commerciaux et la façon dâhabiter maison individuelle, la reprĂ©sentation de la vitesse et du temps cette ville est Ă 20 min » sous-entendu de voiture mais aussi de ce qui est confortable et dĂ©sirable⊠La prospective âTransitions 2050â, menĂ©e par lâADEME autour des quatre scĂ©narios montre que quelque soit le chemin adoptĂ©, lâobjectif de neutralitĂ© carbone implique autant des changements techniques que sociaux de grande ampleur que ce soit Ă court comme Ă moyen terme. Le paradoxe de lâefficacitĂ© Ă©nergĂ©tiqueDiffĂ©rents travaux montrent que les gains dâefficacitĂ© Ă©nergĂ©tique ne conduisent pas nĂ©cessairement Ă une rĂ©duction de la consommation dâĂ©nergie. Câest le cas des travaux historiques de Jevons sur lâusage du charbon au 19° siĂšcle il observe que plus lâon consomme de charbon, plus on est efficace dans son usage, ce qui permet de rĂ©duire sa consommation pour un processus en particulier⊠et dâen dĂ©multiplier les usages et donc dâen consommer de plus en plus ! Plus rĂ©cemment, diffĂ©rentes dĂ©monstrations montrent que les gains dâefficacitĂ© Ă©nergĂ©tique sans questionnement sur nos pratiques et nos besoins induisent un surcroĂźt de consommation dâĂ©nergie. Dans le secteur du numĂ©rique, la dynamique technologique a procurĂ© dâimportants gains dâefficacitĂ© Ă©nergĂ©tique Ă chaque nouvelle gĂ©nĂ©ration dâĂ©quipements numĂ©riques et dans le traitement des donnĂ©es, câest-Ă -dire quâil Ă©tait possible de faire plus de choses avec la mĂȘme consommation dâĂ©nergie. NĂ©anmoins, les usages ont aussi explosĂ© en parallĂšle, que lâefficacitĂ© Ă©nergĂ©tique seule ne permet pas de compenser. Autre exemple dans le bĂątiment les travaux dâefficacitĂ© Ă©nergĂ©tique comme lâisolation et lâinstallation de systĂšme de chauffage performant nâimpliquent pas toujours la baisse de consommation escomptĂ©e. Les sommes Ă©conomisĂ©es peuvent en effet ĂȘtre rĂ©investies, dans une tempĂ©rature de chauffage supĂ©rieure ou dans dâautres Ă©quipements permettant de rĂ©pondre aux canons du confort domestique. Dans lâautomobile, les gains dâefficacitĂ© des moteurs sâaccompagnent dâune croissance de la taille et du poids des vĂ©hicules. On peut retrouver dâautres formes dâeffets rebonds dans la consommation de biens et services le fait de davantage mobiliser le marchĂ© de lâoccasion pour revendre ses objets peut doper la consommation de produits lâanalyse de B. Keller les gains trĂšs Ă©levĂ©s dâefficacitĂ© Ă©nergĂ©tique des datas centers nâont pas permis de rĂ©duire la consommation totale qui reste constante, courbe verte mais de compenser la multiplication par plus de 10 des trafics. Source maĂźtriser ces effets rebond, il est nĂ©cessaire de se questionner, collectivement, sur nos besoins afin de rĂ©duire nos consommations matĂ©rielles et Ă©nergĂ©tiques, rĂ©flexion qui ne relĂšve pas du champ technique mais bien du champ dĂ©mocratique. Sans cette rĂ©flexion sur nos besoins, et leur modĂ©ration, qui sâapparente Ă une dynamique de sobriĂ©tĂ©, il est probable que des effets rebond multiples nous feront perdre du temps au regard des dĂ©fis incertitudes quant aux solutions techniques par la communautĂ© scientifique et par les citoyensEnsuite, on trouve des incertitudes Ă lâĂ©gard des solutions techniques elles sont Ă©mises tant par les scientifiques eux mĂȘme que par les citoyensDu cĂŽtĂ© des scientifiques dâabord, certaines promesses techniques aujourdâhui promues font lâobjet de controverses sur leur capacitĂ© Ă rĂ©duire de façon effective les Ă©missions carbone. JusquâoĂč pourrons-nous utiliser les technologies de carbon dioxide removal » sans impacter nĂ©gativement dâautres dimensions environnementales ex. impact sur les sols et la biodiversitĂ© quand cela repose sur lâusage de biomasse et sans autres impacts nĂ©gatifs voir le tableau des risques et impacts p96 du Technical Summary du GIEC ? La communautĂ© scientifique Ă©met Ă©galement des doutes sur la capacitĂ© Ă rĂ©soudre les enjeux environnementaux associĂ©s aux modĂšles agro-alimentaires climat, biodiversitĂ©, pollution des eaux et des sols en se fondant uniquement sur des Ă©volutions dâordre techniques changer les pratiques alimentaires semble indispensable pour rĂ©duire la pression planĂ©taire sur la biosphĂšre voir par exemple le travail de la commission Eat the Lancet ou le scĂ©nario TYFA. Du cĂŽtĂ© des citoyens Ă©galement, la rĂ©cente Ă©tude pilotĂ©e par lâADEME autour des 4 scĂ©narios prospectifs âTransitions2050â montre que les scĂ©narios les plus technophiles soulĂšvent diffĂ©rentes inquiĂ©tudes de la part des citoyens. Par exemple, dans le scĂ©nario dans lequel le numĂ©rique et lâintelligence des objets serviraient Ă rĂ©guler nos consommations, les citoyens Ă©mettent des craintes sur la gouvernance des donnĂ©es et sur la marchandisation qui en serait faite. Sur le sujet environnemental, les citoyens mettent Ă©galement en doute la capacitĂ© des innovations techniques seules pour rĂ©soudre les enjeux climatiques, soulĂšvent des risques de âfuite en avantâ, de greenwashing. Il leur semble nĂ©cessaire de sortir de ces promesses techniques pour questionner tant leurs besoins que les valeurs souhaitables Ă mettre au cĆur de la sociĂ©tĂ©, pour refonder un nouveau contrat social.Voustrouverez ci-dessous la(les) rĂ©ponse(s) exacte(s) Ă MODE DE VIE DES ARTISTES EN MARGE DE LA SOCIETE que vous pouvez filtrer par nombre de lettres. Si les rĂ©sultats fournis par le moteur de solutions de mots flĂ©chĂ©s ne correspondent pas, vous trouverez une liste de rĂ©sultats proches.
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Apache Graffiti-artiste Apache, artiste âgraffiti-vandalepur-et-durâ aime graffer sur le terrain », ce territoire de lâombre qui lâa amenĂ© Ă la lumiĂšre et dans lequel il puise toute son Ă©nergie. Sa motivation, la compĂ©tition ; son adrĂ©naline, lâinterdit Der Graffiti-artiste LâĆuvre de Der revisite le calligramme et le writing et sâempare dâĂ©lĂ©ments empruntĂ© Ă la pop culture. Un artiste qui maĂźtrise la technique pour donner vie Ă ses crĂ©ations quâil investit. Sike Graffiti-artiste Sike, artiste vandaliste » en marge de la sociĂ©tĂ©, est un vĂ©ritable acharnĂ© du tag et des lettres. Julie Beguin Peintre Quand dâautres Ă©crivent dâune plume, maux et plaisirs de la vie, Julie BĂ©guin pose sur la toile ses humeurs en couleurs. PassionnĂ©e dâart et de dessin depuis toujours, si elle laisse parler sa crĂ©ativitĂ© dans sa peinture, au doigt, au pinceau, Ă la bombe et mĂȘme Ă lâĂ©ponge, câest surtout Ă lâinstinct quâelle croque son destin. InspirĂ©e par le moindre ressenti, Ă©chappatoire, bulle, explosion ou exutoire, ces tableaux lookĂ©s contemporains racontent lâintrospection sans borne, celle qui splashe sans faire de tĂąches. Eric Roussel Peintre Issu dâune famille maternelle vĂ©nitienne de mosaĂŻstes dâart, lâartiste Eric ROUSSEL a Ă©tĂ© initiĂ© dĂšs lâenfance Ă cette spĂ©cialitĂ©. Cette dĂ©couverte des Ă©clats de lumiĂšres colorĂ©es des matiĂšres, sâexprime aujourdâhui, dans ses peintures Ă lâhuile. De ses toiles se dĂ©gagent des vibrations fortes et une Ă©nergie aussi dĂ©bordante que communicative. Arnaud Chapalain Peintre NĂ© le 29 juin 1980,Ă Tonnerre en Bourgogne, il crĂ©e sa premiĂšre toile en voulant reproduire le tableau que sa mĂšre voulait acheter. Peintre autodidacte, il nâutilise que le noir pour jouer en transparence avec le blanc de son support que ce soit une toile ou du bois. Il cherche lâintensitĂ© du regard de ses sujets pour toucher la sensibilitĂ© du spectateur Les yeux sont le miroir de lâĂąme » GĂ©raldine G. Plasticienne Autodidacte de 33 ans et passionnĂ©e de pop art, chacune des Ćuvres de GĂ©raldine G. est unique et demande des dizaines dâheures de travail. InspirĂ©e par des grands noms tels que Andy Warhol, Roy Lichtenstein, Keith Haring, son univers est joyeux et colorĂ©. MalgrĂ© sa tĂ©traplĂ©gie dĂ» Ă une maladie neuromusculaire, chaque tableau est un combat gagnĂ© et lui procure une sensation de libertĂ© quâelle est fiĂšre de transmettre Ă tous ceux qui apprĂ©cient son travail. Mohamed Zadi Peintre et sculpteur Artiste autodidacte, il sâintĂ©resse des son plus jeune Ăąge Ă la peinture et Ă la sculpture. Depuis ces derniĂšres annĂ©es, il a activement participĂ© aux mouvements artistiques nationaux avec plusieurs expositions individuelles et collectives au Maroc. Draz Photographe Photographe autodidacte, Draz fait ses classes dans les ruelles. Il sâoriente naturellement vers le portrait. Nouvelles technologies, procĂ©dĂ©s photographiques anciens, Draz mĂ©lange les genres et rĂ©alise un voyage intĂ©rieur dont chaque pas est, pour lui, plus essentiel que la destination. Cobra Art Compagny Collectif de photographes PassionnĂ©s dâart et de dĂ©coration, Cobra Art Company collabore avec des photographes et artistes internationaux pour crĂ©er leurs propres collections dâart. La marque est reconnue pour ses tableaux de photos sur plexiglass. HervĂ© Nys Sculpteur automobile Sculpteur dâArt automobile, HervĂ© NYS est nĂ© en 1960 Ă Cagnes-sur-Mer. Il fait ses Ă©tudes dans la mĂ©canique agricole puis sâengage dans lâaĂ©ronavale en tant que mĂ©canicien avion. La fusion de sa maitrise du bronze et de son expĂ©rience de la mĂ©canique, donne naissance Ă des sculptures inĂ©dites dans lâArt contemporain. Julien Durix Peintre Julien Durix est un jeune artiste qui met en scĂšne des protagonistes de son enfance. Depuis toujours des personnages iconiques cĂŽtoient ses toiles. Il peint comme il respire, et il nous invite Ă le rejoindre dans ce monde plein de couleurs oĂč il laisse libre court Ă son imagination dĂ©bordante. Tiven Peintre Certaines compositions de Tiven sont accompagnĂ©es de textes en forme de haĂŻkus qui parlent de nos luttes quotidiennes. Elle peint Ă lâacrylique sur toile de coton ou de lin, finissant par un vernis qui donne Ă ses piĂšces un effet huile». Thomas Crauwels Photographe Thomas est un passionnĂ© des hauts sommets des Alpes suisses et françaises. Depuis 10 ans il parcourt inlassablement ces hauts espaces pour transmettre sa fascination du monde minĂ©ral et de glace qui constitue la haute montagne. Thomas est en recherche permanente dâambiances, de textures et de lumiĂšres. Jean-Luc Sert Peintre Le travail Ă lâhuile me pousse naturellement » Ă pratiquer une peinture de terre, de sang et dâeau. Je vais Ă la rencontre de chacun de mes tableaux, me centrant sur ce quâil requiert au fur et Ă mesure de sa rĂ©alisation, tout en respectant les invariants propres Ă la peinture. Je fais provision de couleurs avec tous les Ă©lĂ©ments qui mâentourent. Julien Dalzon Photographe Des clichĂ©s pris aux 4 coins du globe voyages, paysages, montagnes, sports de glisse, tropiques, modĂšles et tout le beau croisĂ© en chemin ! La photographie, trĂšs contrastĂ©e, en noir et blanc, est coulĂ©e dans la rĂ©sine et la fibre de verre pour ensuite ĂȘtre montĂ©e sur une structure en acier brut et Ă©clairĂ©e de lâintĂ©rieure. Des Ćuvres uniques qui allient photographie, art et design. Sarah Pastre Plasticienne DiplĂŽmĂ©e dâun Master dâĂ©tudes et de recherches sur la mode, je travaille depuis prĂšs de 20 ans dans le milieu du design de mode, de la crĂ©ation et du marketing. A travers cette collection, je cherche Ă exprimer, rĂ©vĂ©ler et mettre en valeur des thĂšmes qui me sont chers. Ils se mĂȘlent et se superposent le corps, le textile et la dĂ©licatesse. Ces crĂ©ations textiles, sont en somme, la parfaite coĂŻncidence entre ma personnalitĂ©, ma sensibilitĂ© et mon savoir-faire. Vendredi Peintre A travaillĂ© et travaille toujours .. en musĂ©ographie pour des parcs nationaux et rĂ©gionaux, le Conservatoire du Littoral, des associations de protection de la nature, collectivitĂ©s, etc , ⊠par la rĂ©alisation de sculptures, bas-reliefs, peintures, illustrations, maquettes, fresques, etc , âŠPeinture figurative Ă lâhuile sur toile. Gil Crochet Peintre AprĂšs avoir produit une suite dâinstallations Ă©phĂ©mĂšres, mĂȘlant volumes, vidĂ©os, photographies et peintures dans les annĂ©es 2000, je suis revenu aux tableaux avec une production moins conceptuelle et plus sur lâexpĂ©rience esthĂ©tique, lâĂ©motion, le sensible. Au seuil de lâabstraction et de la figuration, la sĂ©rie prĂ©sentĂ©e Ă lâespace 55 ce printemps 2021, Back to the trees » donne un sens plus figuratif, Ă ce qui ne pourrait ĂȘtre que la volontĂ© dâune gestuelle purement abstraite Christelle Calmettes Photographe Auteur-photographe depuis 2005, la vision du rĂ©el de Christelle Calmettes est double trĂšs structurĂ©e voire graphique oĂč la composition est lâaxe majeur de sa prise de vue ou bien trĂšs floue. Cette vision structurĂ©e lui permet de donner une certaine intemporalitĂ© dans ses images. Le flou reprĂ©sente la part dâimaginaire et dâinterprĂ©tation propre Ă chaque spectateur. La photographie doit dĂ©passer la description. Elle doit Ă travers la description, amener le spectateur Ă lâintĂ©rieur du sujet ou rĂ©vĂ©ler le sujet, non pas tel quâil apparaĂźt mais de la façon dont on le ressent. » Philippe SĂ©billotte Photographe Philippe Sebillotte parcourt le monde depuis prĂšs de quinze ans pour dĂ©couvrir les hommes, les cultures et les paysages. Câest lâInde qui le fascine dans un premier temps, pays oĂč il sĂ©journe Ă de trĂšs nombreuses reprises. Ses pas le conduisent Ă©galement dans dâautres pays dâAsie et tout particuliĂšrement en Chine. Tout au long de ses pĂ©riples il aime observer et âsaisirâ les gens, le spectacle de la rue et les moments magiques face Ă des paysages sublimes et insolites quâil choisit le plus souvent de traiter en noir et blanc. Olivier Robert Photographe Olivier Robert partage sa vie entre Europe et Japon. Depuis plus de 25 ans, sa photographie se base sur une expression minimaliste. InitiĂ© trĂšs jeune aux procĂ©dĂ©s de tirages en chambre noire, il acquiĂšre son premier appareil Ă 15 ans et dĂ©couvre Ă©galement lâAsie et ses richesses culturelles. Une expĂ©rience qui influencera dĂ©finitivement sa vie et son regard sur le monde. Aujourdâhui il se rend rĂ©guliĂšrement au Japon Ă la recherche de scĂšnes naturelles qui lui inspirent intemporalitĂ©, simplicitĂ© et mystĂšre. Marc Muller Photographe Marc Muller a fondĂ© le Studio 404 en 2006. Photographe indĂ©pendant installĂ© Ă Annecy depuis 2002 dans le domaine de la publicitĂ© et plus largement de lâOutdoor. SpĂ©cialiste des travaux de portraits, mode, sport ou architecture avec paysage reste au cĆur de son travail depuis ses dĂ©buts en 1995. Des images mentales apparaissent devant son objectif comme des Ă©vidences et le travail de rĂ©pĂ©tition par lâobservation et la contemplation apporte lâimage rĂȘvĂ©e. Savoir changer de dĂ©cor est aussi une chance prĂ©cieuse. Lolek Artiste sculpteur LOLEK est un artiste français, nĂ© en 1984. PrĂ©coce, il compose ses premiĂšres crĂ©ations en argile Ă 11 ans et propose ses premiers bronzes en exposition Ă 12 ans. Il rĂ©vĂšle un sens innĂ© des Ă©quilibres et travaille des formes gĂ©nĂ©reuses. Jean Christian Photographe JEAN CHRISTIAN sâattache tout dâabord Ă capter la poĂ©sie de dĂ©tails ordinaires qui ne retiennent lâattention de personne traces, fissures, aspĂ©ritĂ©s, reflets et autres stigmates urbains. Ses crĂ©ations flamboyantes, mĂ©tissĂ©es et uniques invitent au voyage et vous emmĂšneront assurĂ©ment vers un ailleurs inattendu. GwenaĂ«l Bollinger Photographe Auteur photographe lyonnais nĂ© en 1973, GwenaĂ«l dĂ©couvre le monde de lâimage grĂące Ă diffĂ©rentes expĂ©riences dans le graphisme. Nourri et sensibilisĂ© Ă lâimportance de lâesthĂ©tique, il a rapidement ressenti le besoin de sâexprimer Ă travers ses propres crĂ©ations. Ses sources dâinspiration proviennent dâunivers picturaux variĂ©s tels que le cinĂ©ma, la peinture, ou la photographie. Christian Vogt Peintre Artiste peintre autodidacte, natif du mondeâŠ, inspirĂ© par de nombreux voyages, les grands espaces, la nature et une formidable rencontre qui mâont rĂ©vĂ©lĂ© mon dĂ©sir de crĂ©er. Je peins essentiellement des portraits de femmes et dâhommes avec une technique Ă lâhuile. Ce qui mâintĂ©resse, câest dâapprocher lâĂąme humaine derriĂšre chaque crĂ©ation, ces regards vous toucheront autant quâ ils mâont inspirĂ©s. Boucheret Photographe La sĂ©rie Metalrugit » revisite les annĂ©es pop art et cut-up dans un style trĂšs graphique et airbrushed oĂč le dĂ©tail â tĂŽle, cuir, cambouis, caoutchouc â devient lâobjet central. Les triptyques associent les Ă©poques, les Ă©curies Ă partir de vĂ©hicules emblĂ©matiques de lâhistoire de la compĂ©tition automobile. En noir et blanc, il utilise des anciens appareils photos moyen format des annĂ©es 1920 Ă 1950 pour retrouver le modelĂ© et lâauthenticitĂ© des reportages dâĂ©poque, Ă lâinstar de Jacques Henri Lartigue. Muliardo FQD Peintre et sculpteur Florence Muliardo Roy, artiste plasticienne se consacre aujourdâhui principalement Ă la sculpture de grandes dents en rĂ©sine. La forme achevĂ©e, elle la laque et la sublime avec des personnages cĂ©lĂšbres rĂ©vĂ©lant un art lumineux et joyeux. Outre son originalitĂ©, son style se distingue par la prĂ©cision des formes et la touche dâhumour insufflĂ©e. InfluencĂ© par le pop-art et le graffiti-art, il se caractĂ©rise par un univers trĂšs colorĂ©. Anita Rautureau Peintre Les tableaux de lâartiste chantent lâamour, la maternitĂ©, la saveur du temps, le bien-ĂȘtre humain dans la nature qui lâenveloppe. Les couleurs chatoyantes se posent sur des motifs floraux, linĂ©aires ou spiralaires, et la rondeur des traits et des arabesques caressent les sens du spectateur. Audrey Fortin MosaĂŻque d'Art Jâexplore avec modernitĂ© une technique de la mosaĂŻque traditionnelle et ancestrale. La concrĂ©tisation de mon art est issue du mĂ©lange entre mes voyages, mes rencontres, mon expĂ©rience et mon savoir-faire. Câest Ă travers mes crĂ©ations que je vous propose une nouvelle façon de percevoir lâart de la mosaĂŻque et ses multitudes de possibilitĂ©s ». Chautagnat Plasticienne A travers la symphonie des couleurs et de la matiĂšre, l âartiste rĂ©invente la crĂ©ation du monde. Sa gĂ©ographie cosmique sâapparente Ă celle du rĂȘveur qui veut revoir l âunivers tout en beautĂ©, pour pallier aux offenses que les hommes lui portent. Peinture chaude et enveloppante qui vous pousse Ă pĂ©nĂ©trer dans l âinfime des molĂ©cules de lâair et de l âeau, du ciel et de la terre. Fred Bernard Peintre Câest la vie qui mâa amenĂ© Ă la peinture. Chaque Ă©tape, chaque partie de mon existence construit la suivante. Le lien entre tout cela, câest ma sensibilitĂ©. Je la dĂ©couvre Ă lâĂąge de six ans ; je prends conscience de cette Ă©nergie Ă la mort de mon pĂšre. Ensuite, câest une lutte, une incomprĂ©hension totale. VoilĂ la premiĂšre Ă©tape ne rien comprendre. Pourtant je vibre Ă tout, je ressens tout. » Hanae Biro Peintre Mes crĂ©ations reflĂštent le corps et lâesprit de la nature. Chacune de mes Ćuvres est unique et aspire Ă vous faire voyager dans de proches et lointaines contrĂ©es. Je souhaite que mes tableaux puissent colorer votre quotidien, Ă lâinstar du sourire de mes enfants qui colorie mon quotidien ». Alors quand la tĂ©lĂ©vision ne fait que nous pousser Ă la consommation, comme les magazines, la radio, les affiches sur les abris bus ou les bĂątiments; ça m'plait pas. D'autant qu'on est influencĂ©s , que dis-je manipulĂ©s par les lobbyistes; dans le seul but de les enrichir, quitte Ă le payer de notre santĂ©.
Zubair Irak AFP - Adnane Abdelrahmane exhibe tambours et percussions dont il a appris Ă jouer dĂšs l'Ăąge de 12 ans. Dans un Irak patchwork de communautĂ©s et d'ethnies, il fait partie de cette minoritĂ© noire pluri-centenaire, gardienne des traditions musicales, mais relĂ©guĂ©e en marge de la sociĂ©tĂ©. ImplantĂ©e dans la rĂ©gion de Zubair, prĂšs de Bassora dans l'extrĂȘme sud irakien, la communautĂ© tire ses origines d'Afrique de l'Est. Ici, comme dans tous les villages reculĂ©s d'Irak, s'affichent Ă chaque coin de rue pauvretĂ© et dĂ©liquescence des services publics, avec des routes poussiĂ©reuses bordĂ©es de maisons borgnes en suite aprĂšs la publicitĂ© Si des militants dĂ©noncent la marginalisation de la communautĂ©, parler Ă Zubair de racisme ou de discriminations froissent les habitants qui prĂ©fĂšrent en arabe l'euphĂ©misme de "peau foncĂ©e" Ă l'emploi du mot noir. A 56 ans, M. Abdelrahmane fait partie d'une de ces troupes de musique populaire ayant fait la cĂ©lĂ©britĂ© de Zubair dans tout le pays et jusqu'au KoweĂŻt frontalier, Ă une trentaine de kilomĂštres seulement. "A Zubair, on ne compte plus le nombre de troupes", dit Ă l'AFP le musicien, installĂ© sur un matelas au sol dans son salon. "C'est une profession dont on hĂ©rite. Si quelqu'un meurt, son fils prend sa place, pour que l'art ne disparaisse pas", explique-t-il, ajoutant que dans sa famille, son oncle chantait et son pĂšre jouait du tambour. Munis de darboukas, tambours et daf grand tambour en peau de chĂšvre, les musiciens animent notamment les mariages en menant la "zaffa", procession consistant Ă cĂ©lĂ©brer les mariĂ©s, en dansant et chantant. M. Abdelrahman, qui se produit depuis quatre ans au sein d'une "Association du patrimoine", parrainĂ©e par le ministĂšre de la Culture, reconnait que "la majoritĂ©" des artistes sont noirs mais assure ne pas ressentir de racisme. - "Discrimination positive" -La suite aprĂšs la publicitĂ© Des militants tiennent cependant un tout autre discours. "Ceux qui ont la peau foncĂ©e sont des citoyens de cinquiĂšme classe, mĂȘme pas de seconde classe", dĂ©plore Majed al-Khalidy, employĂ© dans une compagnie pĂ©troliĂšre de Bassora. Le trentenaire rĂ©clame des opportunitĂ©s d'emplois et logements dignes et dĂ©nonce la dĂ©scolarisation qui fait des ravages. Il fustige aussi des abus de langage, rĂ©pandus mĂȘme chez les clercs religieux, le terme "esclave" en arabe Ă©tant encore utilisĂ© pour dĂ©signer un noir. Historiquement la minoritĂ© noire -entre et deux millions d'Ăąmes, selon des estimations informelles- a des ancĂȘtres venus du Kenya, d'Ethiopie ou encore du Soudan, indique Ă l'AFP l'historien Ibrahim suite aprĂšs la publicitĂ© C'est dans la rĂ©gion de Bassora qu'arrivaient des esclaves pour rĂ©aliser "le travail Ă©reintant d'assĂšchement des marais salants". "Dans les Ă©crits historiques, la premiĂšre mention de la communautĂ© remonte Ă 869 quand ils se sont rĂ©voltĂ©s", ajoute l'expert, en rĂ©fĂ©rence Ă la "rĂ©bellion des Zanj". Ce soulĂšvement contre la dynastie arabe des Abassides a permis aux anciens esclaves d'Ă©tablir pendant une quinzaine d'annĂ©es leur propre citĂ©, avant d'ĂȘtre dĂ©faits. Aujourd'hui, Majed al-Khalidy croit en la "discrimination positive" dans le pays multiconfessionnel et multi-ethnique, et rĂ©clame l'inclusion de sa communautĂ© au systĂšme actuel des quotas permettant Ă certaines minoritĂ©s, chrĂ©tiens ou yazidis par exemple, d'Ă©lire un reprĂ©sentant au Parlement. "Pour rĂ©clamer ses droits, il faut ĂȘtre proche des dĂ©cideurs", justifie M. Khalidy. Car mĂȘme s'il est antisystĂšme, il reste rĂ©aliste dans un Irak oĂč un tiers de la population de 41 millions vit dans la pauvretĂ© et est dirigĂ©e par des partis clientĂ©listes, dont les dĂ©putĂ©s peuvent garantir des emplois suite aprĂšs la publicitĂ© - "Long chemin" - Illustration d'un timide changement? La premiĂšre chaĂźne d'information Ă©tatique compte depuis plus d'un an parmi ses prĂ©sentatrices une jeune femme noire, Randa Abdel Aziz, qui dĂ©sormais dĂ©cline les interviews pour Ă©chapper au feu des projecteurs aprĂšs avoir fait le buzz. Sur son site Internet, l'ONG internationale Minority Rights Group MRG Ă©voque "des taux disproportionnellement Ă©levĂ©s d'analphabĂ©tisme et de chĂŽmage" dans une communautĂ© largement confinĂ©e aux emplois d'ouvriers et de travailleurs domestiques. "La discrimination se constate Ă tous les niveaux", reconnaĂźt Saad Salloum, expert des questions de diversitĂ© religieuse et ethnique en suite aprĂšs la publicitĂ© "Politiquement ils n'ont pas de reprĂ©sentation. Socialement certains stĂ©rĂ©otypes restent enracinĂ©s dans la culture dominante. Economiquement la majoritĂ© vit sous le seuil de pauvretĂ©", rĂ©sume l'expert. En 2013, Jalal Thiyab, fondateur de la premiĂšre association de dĂ©fense des droits de la minoritĂ©, avait Ă©tĂ© assassinĂ©, peu aprĂšs des Ă©lections locales Ă Bassora. "Il reste un long chemin Ă parcourir afin de parvenir Ă l'Ă©galitĂ© pour cette minoritĂ© et toutes les autres", estime M. Salloum.Modede vie des artistes en marge de la sociĂ©tĂ© Solution est: B O H E M E « PrĂ©cĂ©dent Tout Grille 4 Solution Suivant » Sur CodyCross CodyCross est un cĂ©lĂšbre jeu nouvellement publiĂ© dĂ©veloppĂ© par Fanatee. Il a beaucoup de mots croisĂ©s divisĂ©s en diffĂ©rents mondes et groupes. Chaque monde a plus de 20 groupes avec 5 grille chacun.